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 Toute forme créée, même par l'homme, est immortelle. - Chark

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Aristarkh N. Leonidov
Aristarkh N. Leonidov
AND ALL THAT JAZZ
Pseudo + Prénom : strawbale/Sarah
Missives : 442 Points : 98
Avatar : Michael Fassbender Crédit : JAN (avatar)
Âge : 32 ans
Statut : Veuf, c'est ce qui arrive quand on règle son compte à sa chère et tendre. Désormais entre Charles et Apo il va falloir choisir sur quel pieds danser.
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Occupation : Ancien membre de la mafia. Gérant d'un restaurant où je t'assure que tu ne veux pas aller et du bar clandestin dans son sous sol où tu rêves de pouvoir poser ton derrière fortuné.
Gramophone : Arctic Monkeys - Do I wanna know
Doubles-comptes : Littlefiger is a woman
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MessageSujet: Toute forme créée, même par l'homme, est immortelle. - Chark   Toute forme créée, même par l'homme, est immortelle. - Chark EmptyMer 4 Sep - 20:37

pseudo & pseudo
titre du rp


Bienvenue dans le merveilleux sujet de Pseudo du créateur du sujet qui va avoir l'honneur d'avoir comme partenaire Pseudo du/des autre(s) participant(s). Pour leur sujet, ils autorisent/interdisent l'intervention d'un PNJ inoffensif qui pimenterait le rp et ils autorisent/interdisent l'intervention de membres extérieurs qui passeraient par là. Ne sont-ce pas là des choix merveilleux ? L’histoire se déroule le date à heure alors que la météo est adjectif. À présent, il est temps de laisser la parole au créateur du sujet : court résumé de la situation.





La fidélité est un vice de pauvre.
Charles feat Arik.

 



Tic. Toc. Je levai la tête vers la magnifique horloge massive qui trônait dans la pièce. Je n'avais rien à faire dans mon bureau à une heure pareille. Il n'était pas assez tard, ni assez tôt. Je n'avais pas dormi de la nuit et ma balade nocturne dans le quartier n'avait pas été très productive. L'avantage de posséder un bar clandestin c'est que ça me donnait une excuse pour être debout au moins une partie de la nuit. Mais en fin d'après midi New York est morte. New York est calme. Le travail de la journée s'achève pour la plupart alors que les nocturnes commencent seulement à s'éveiller. Et moi je suis assis dans mon bureau. Je sirote un bourbon et fume lentement mon cigare, penché sur un relevé de comptes dont je n'ai pas lu la moindre ligne depuis que je l'ai sous les yeux. Je ressens l'ampleur des lieux alors que je suis seul dans ce rendez vous de débauche et de plaisir. Même Apollonie n'est pas là. Elle fait sa bière. Je crois. J'ouvre le tiroir de droite du meuble en bois et sors mon revolver que je contemple d'un œil paternel. Combien de fois ai-je risqué ma vie avec lui ? Combien de fois en a-t-il prise pour moi ? J'ai envie de jouer. Désespérément. Je suis inexorablement attiré par le métal froid et le poids aléatoire selon le nombre de balles, selon le danger, selon l'enjeu. Je sais que je ne peux pas jouer seul. Je ne suis pas suicidaire. J'ai seulement envie de jouer, et pour ce jeu il faut un partenaire. J'ai besoin de ma décharge d'adrénaline pure. J'ai besoin de sentir mon organe cardiaque rater un battement, pas d'une overdose, pas de plomb dans la cervelle. Je sais que quelqu'un devra prendre quelques millimètres dans le crâne pour que je puisse avoir ma dose mais c'est le jeu non ? Je ferme les yeux. Tentant de me concentrer sur autre chose. Je me sers un nouveau verre de scotch et allume une cigarette. La nicotine n'est pas suffisante, le tabac m'enfume l'esprit, l'éthanol engourdi délicatement mes sens mais ce n'est pas assez, ce n'est pas comparable. Il faut que j'arrête. Sinon je vais repenser à la guerre. Je rouvre les yeux. Il faut que je me concentre. Baudelaire. Il est le seul à la hauteur. Je récite quelques vers, j'apaise mon âme et ralentis ma pulsation. D'un mouvement décidé je referme le tiroir et met le revolver dans ma poche alors qu’éteignant la lumière j'attrape ma veste et quitte les lieux.

La chaleur de l'été New Yorkais se joint au bâtonnet salvateur pour écraser mes poumons alors que je sens la douce caresse du soleil sur mon visage. Je sais déjà où mes pas me portent. Il faut neutraliser les souvenirs par d'autres souvenirs, combattre l'envie par l'envie. Je fouille dans ma poche pour y trouver un petit morceau de papier fraîchement plié. Un service demandé par Bob. On ne refuse rien à Bob, pas même moi. Encore à son âge Bob est le maître de la ville, en tout ça il reste ce qui se rapproche d'une figure paternelle pour moi. Je reconnais que Nikolaevitch sonne mieux que Bobevitch mais peut être que lui aurait été bon à autre chose qu'engrosser les putains de toute la sainte patrie avant de se pavaner à la cour, ou peut être pas. Bob est une belle ordure. Je relis l'adresse où mes pas me portent déjà d'eux même. Je connais New York. Elle m'a abusé un temps, pendant un an et puis j'ai compris, j'ai ouvert les yeux et j'ai vu, désormais je sais, je connais cet endroit de font en comble, chaque ruelle, chaque caniveau, chaque commerce un peu louche ou pas, surtout louche en réalité.

Une maison close. Retour au point de départ. J'entre sans me faire prier, en territoire conquis. Parce que j'entre n'importe où dans ce monde, parce que j'entre comme je veux dans un bordel, j'ai un laissé passé à vie. Je suis marqué de l'odeur des filles de joies slaves, né des cuisses d'une femme comme les demoiselles déjà si empressées de s'enquérir de mon bien être. Oui il faut bien s'occuper de moi. Je ne dirais pas non. Je leur souris alors qu'elles s'approchent de moi. Aucune de m’appellera le bâtard ici. Elles sont jeunes, très jeunes. Elles ne ressemblent pas à des prostituées, ce ne sont pas des lionnes, seulement des petits chatons qu'on a rassemblées sous un toit et qu'on offre en pâture au premier venu. Elles n'ont rien du charme des putes traditionnelles, elles n'ont pas de sensualité, aucune grâce, aucun savoir faire, je le vois, je le sens, elles sont maladroites et trop pressées. Le temps n'existe pas dans une maison close, il se transforme en argent. Elles ont seulement ce point commun d'être belles et perdues. Jeunes et sans éducation. Elles sont fades. Sauf une ou deux. Une ou deux avec un potentiel plus marqué. Elles pourraient devenir des vraies poules ces deux là, peut être, avec un bon apprentissage. Elles ont quelque chose de sauvage. Une attraction involontaire. Je m'approche de la blonde d'un pas souple. Elles sont nombreuses autour de moi, à croire que je suis le seul homme qu'elles aient jamais vu franchir la porte. Elle me fixe de son regard azur et se lève, me présentant son corps nu. Je parcours des yeux son être sans défaut, ses formes acceptables, son visage plaisant. Je pose une main sur son épaule, elle ne bronche pas alors que mes doigts jouent avec la peau satinée de son dos, elle diminue encore la distance entre nous, se collant presque à moi. Je ne peux rien contre elle. Elle si banale, elle si animale. Je ne peux rien contre les femmes et leur plastique envoûtante, et leur regard hypnotique.

Je ferme les yeux et je revois le monde il y a plus de dix ans, je revois l'effervescence, je revois l'agitation perpétuelle. Les cris, les rires, les pleurs. Le bruit. Cet endroit est trop calme. Une chose est sûre Bob n'a rien à craindre du quelconque mac minable qui tient cet endroit. Quelques gloussements résonnent cependant soudainement dans le bâtiment, m'arrachant à une étude savante de la marchandise alors que quelques jeunes femmes supplémentaires viennent se joindre à l'attroupement, riant et plaisantant dans une langue qui résonne immédiatement à mes oreilles. Mes yeux s’allument alors que je leur souris d'un air satisfait, un rictus confiant étirant mes lèvres Подход. Присоединитесь к нам дам. Celle qui riait quelques instants auparavant à gorge déployée se tait et arrête son regard sur moi. Elle s'approche, intriguée par l'accent caractéristique venu flatter ses tympans. Celle là c'est une vraie. Le gérant à peut être jugé digne de s'en procurer au moins une qui soit compétente pour donner des leçons aux autres. Elle pose ses mains sur mon torse, pas trop vite, pas trop fort et plantant ses yeux dans les miens me pousse jusqu'à la banquette, me faisant asseoir. Pas mal. Le reste des filles regardent faire, intriguées, à moitié jalouses, certaines s'approchent et m'entourent à nouveau, me couvrant de leur peau, dévorant mon cou de leurs lèvres, tandis que la fine brune s'aventure vers ma bouche.

Une ombre. Une silhouette. Un bruit de pas. Quelques unes se redressent, toutes le regarde, sauf ma nouvelle amie qui s'empare de mes lèvres, mais je ne suis plus à elle. Je ne suis plus là. Alors que je m’apprête à parler j'entrevois le visage de l'homme. C'est impossible. J'arrache mon visage à l'entreprenante créature alors qu'un simple nom m'échappe. Charles ? Un prénom oublié, volontairement écarté. Des souvenirs mis de côté. Trop douloureux et bien trop fort. Je me sens défaillir alors que me levant d'un mouvement brusque je le vois désormais clairement. C'est impossible. Je dois rêver. J'ai une hallucination. C'est l'alcool, c'est l'odeur de sexe qui traîne entre ces murs, c'est la frustration de ne pas jouer ma vie alors que lui a perdu la sienne. Ça ne peut pas être lui. Pourtant il lui ressemble. Je sens mon cerveau défaillir un millième de seconde. Arik aurait perdu toute contenance, Aristarkh n'est pas de la même trempe. Je réalise la présence de toutes ces catins collées à moi et je sens le malaise m'envahir alors que je fais potentiellement face à Charles. En direction de ma jeune nymphe trop rapidement éconduite je lâche un sec Оставьте нас. Mon esprit refuse de coopérer, il ne veut pas réaliser cette situation. Les demoiselles nous quittent, me laissant en tête à tête avec Charles. Mais Charles est mort.

Charles E. Duval
Charles E. Duval
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Avatar : James Mc Avoy Crédit : © Blondie
Âge : Une petite trentaine il pense.. Mais rien est vraiment sûr.
Statut : Il est persuadé qu'il a été marié, mais personne n'est venu le réclamer, il se considère donc comme célibataire, d'autant plus qu'il se souvient pas de sa femme.
Occupation : Gère une maison close glauque - ouvreur au théâtre
Gramophone : Je bois et puis je danse - Aline
Doubles-comptes : blonde hyperactive et violente pour vous servir.
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MessageSujet: Re: Toute forme créée, même par l'homme, est immortelle. - Chark   Toute forme créée, même par l'homme, est immortelle. - Chark EmptySam 7 Sep - 15:59


La fidélité est un vice de pauvre.
Charles feat Arik.

 



Le rire gras et salé des filles rentrèrent dans sa tête. Nasillarde et ennuyante, elle se trémoussait surement sans grande classe devant un homme qui n’en voudrait même pas pour son argent. Ou peut être que si pour une fois. Mais ce n’était pas le plus important. Le plus important, le plus démoniaque c’était cette lourdeur qui s’emparait de sa tête et de chacun de ses membres. Le plus dérangeant c’était ses rires qui grinçait à l’intérieur de chacun de ses neurones et qui forçait son réveil. D’un grognement sourd, indistinct et douloureux il s’échappa au sommeil, essayant d’éviter en vain ces gloussements qui lui tordaient l’âme. Elle était sale, ses belles, de lui faire ça si près de ses oreilles... Il eut un mouvement de sursaut lorsque les micro particules de poussière qui flirtait avec son tapis depuis trop longtemps pénétrèrent dans son nez sans qu’il n’eut rien demander. Secouant la tête bêtement, il fit cru faire un mouvement vif de sa main pour venir déloger la poussière importune, mais ce fut une main lourde et pataude qui vint s’écraser sur son visage encore léthargique. Péniblement, comme si chacun de ses gestes étaient une véritable torture il se retourna, s’échouant sur le dos comme une baleine avariée. Il respira péniblement, regardant son plafond comme si ce dernier s’apprêtait à l’écraser de tout son poids. Il ferma les yeux, se laissant à nouveau pénétrer à son insu, par les rires de ses filles. Il soupira de toute sa lourdeur, se demandant une nouvelle fois comment faisait-il, pour échapper, jour après jour, à la douleur d’être ce qu’il était. Laissé immobile sur le sol de son bureau, il n’était même pas parvenu jusqu’au lit, qui traînait, minable et poussiéreux dans un coin de la pièce. Moue et vidé de toute énergie, il sentait chacun de ses muscles se faire écarteler par une force imaginaire. Et soudainement cette douleur lancinante qui l’obligea à ouvrir les yeux, à se relever à demi et à s’attraper le genou, à crier de tout l’air disponible. Il sentait la balle venir se loger encore dans sa rotule, et la faire imploser en un puzzle grossier. Il se laissa retomber sans vie sur son tapis de fortune. Il ne boirait plus. Enfin peut être. Jusqu’à ce qu’on lui propose un nouveau verre. Finalement il n’y avait qu’un verre de mauvaise liqueur pour venir résoudre l’agonie dans laquelle la liqueur l’avait plongé à l’origine. Il émit un nouveau râle de douleur, alors que les rires raisonnaient avec plus d’intensité dans son cerveau déphasé. Quel heure était-il ? Pendant combien de temps avait-il été étendu là inconscient, baigné dans son vice et sa solitude ? Autant de question qui venait se mêlé à celle permanente, qui s’était logée dans son crâne il y a plusieurs année et qui ne trouvait jamais de réponse.

La porte de son bureau s’ouvrit sans aucune décence baignant alors son antre d’une lumière nauséabonde. Il souleva légèrement sa tête pour voir quel ange avait bien pu rentrer dans ses appartements, et n’eut pas le courage d’ouvrir les yeux sur son bureau avant d’entendre sa voix qui était bien plus reconnaissable que son faciès. Elle parlait un mauvais Russe, tranché d’un accent Bulgare des plus détestable. Ou alors c’était lui qui était trop exigeant, et encore trop sonné par sa nuit débauchée. «Вы - хорошо Господин Нед?» Il ne manquerait plus que ça. Qu’il soit bien... Pourquoi posait-elle la question ? Avait-il seulement l’air d’aller bien ? A même pas trente ans, il avait l’air d’un crevard crevé au bout du rouleau. Elle était stupide sa parole. «Вы возвратились в Господине восхода солнца Неде. Вы боялись, что кровать душит вас затем вы упали на ковер .» Oh... Merci... A moins qu’elle puisse lire dans ses pensées , elle avait répondu à ses attentes, je veux dire, à ses questions, avant même qu’il ne les prononce à voix haute. Peut être était-ce parce que c’était la même problématique tous les matins. « 16h37 Господин Нед» Quel femme parfaite. Peut être devait-il l’épouser... Mais l’idée d’entendre son accent épouvantable toute sa vie, lui paraissait comme être une torture insurmontable. Si seulement elle se taisait elle pourrait être jolie. «Человек там. Они собираются бороться.» Oh. C’était problématique. En même temps il n’était pas en état de les empêcher de faire leur preuve. L’homme n’avait qu’à se débrouiller tout seul. Ce n’était pas tout à fait son problème. Ou peut être que si... Mais en même temps qui venait dans une maison close à cette heure là aussi... C’était terriblement indécent pour un Samedi après midi. Il fit un geste vague de la main, et vie la silhouette flou de la Bulgare s’approcher lentement, se baisser à ses cotés et l’attraper pour le ramener contre elle, l’aider à se lever et l’assoir dans son siège de bureau. Elle sortit un instant de la salle, le laissant comme un pantin désarticulé face aux meubles en Acajou. Le regard vide qui essayait de se fixer sur quelque chose, il ne vit pas la Bulgare revenir, et fut surpris de voir un verre rempli d’un liquide ambré se glisser sous son nez. D’une main faiblarde il avala cul sec le contenu du verre, et releva la tête, essayant de se secouer un peu avant de recevoir un verre d’eau dans la figure. Toussant de surprise, et soufflant par le nez pour évacué l’eau qui était rentré par le mauvais trou, il se sentit nettement plus réveillé. «спасиба болшои» dit-il faiblement à la jeune femme. Il la laissa ensuite s’approcher, le déshabiller et le rhabiller comme un enfant faiblard, atteint d’une quelconque malade grave. Mais il ne fallait pas se méprendre, l’alcoolisme et le spleen était des maladies qui faisait des ravages et qui démantelait jour après jour l’âme creuse de leur victime. Une fois habillé, il attrapa son pistolet, constamment chargé d’une unique balle, et le rangea à sa ceinture, tapotant fébrilement sur la table de son bureau à la recherche de sa boite à tabac. Il roula une cigarette d’un air distrait et absent, avant de l’allumer sur ses lèvres. Il se laissa un instant retomber sur le dos de son dossier, fermant les yeux, et laissant la fumée acre descendre le long de sa gorge encore pâteuse de la veille. La bulgare entre à nouveau dans le bureau et répète de sa voix étouffante. «Человек там. Они собираются бороться.» Charles souffle l’air de sa poitrine fumeuse, et se lèvre péniblement, son genoux raide de cette douleur lancinante et matinale.

C’est d’un pas lent et insensible que Charles s’avance, décidé à faire taire ce vacarme grandissant qui l’avait sortit de sa torpeur un bout de temps plus tôt. Ses semelles claquaient contre le sol granuleux raisonnant dans sa tête sans dessus dessous. L’homme était assis, la bouche avalé par la Russe. Le charme Russe. Le vrai. Il n’a jamais importé à Charles, mais il le connait, il le comprend. Enfin il pense. Il aime la langueur de la langue, la pureté de leur forme, leur force de caractère. Ses filles de feu, de joie, de vodka. Sa seule présence calme l’affaire, seule la Russe s’en fiche. Forcément. «калина !» vrombit Charles à l’attention de la Russe. Si elle pense s’en tirer comme ça... Mais étrangement s’est l’homme qui se dégage de son emprise. Charles aurait pu voir le fantôme traverser les yeux de l’homme s’il n’avait pas été aussi distrait, aussi malade, aussi mourant de sa dernière soirée. Considérant la situation comme résolue, Charles tourna les talons dans un grincement étrange. Il allait regagner doucement son bureau lorsqu’un accent Russe lui déchira les tympans. « Charles ?» A l’entente de son prénom inconnu, le dit Charles, communément appeler Edgard, Ed ou encore Monsieur Ned sur le continent Américain, se redressa. D’où cet homme pouvait connaître son prénom ? Je veux dire, son vrai prénom, celui dont il avait tout oublié. Celui qu’il portait comme une croix chaque jour de sa pitoyable existence. Son regard s’assombrit, avide d’une vérité qui lui faisait défaut depuis des années. Il entendit l’homme prononcer dans un russe parfait une demande qu’il n’avait pas encore osé prononcé. Il glissa d’un demi-tour mal contrôler sur le sol grumeleux, fit un hochement de tête à ses filles, les faisant disparaître, avant de planté son regard bleu hagard dans ceux de son camarade inconnu. «Вы знаете меня ?» Demanda agressivement Charles. Son regard tremblant craignait des mots qui pourrait traverser la gorge de l’homme qui lui faisait face. Maintenant qu’il était à deux doigts de savoir quelque chose sur ce qu’il était, il craignait de se faire horreur. Mais plus que la peur d’apprendre à se connaître c’était ce silence étouffant qui le tuait. Il donnerait tout pour entendre à nouveau le rire grinçant de ses filles déchirer ses oreilles, pour voir l’homme bouger, réagir, parler. Actionnant sa jambe raide il s’avança d’un pas rompu jusqu’à l’homme, le leva d’une main ferme avant de le plaquer contre le mur, sa main fermement appliqué contre le torse de l’homme. «Qui suis-je ?» Gronda-t-il, sans se rendre compte qu’il avait employé le Français, et qu’il n’avait aucune idée de si l’homme qui lui faisait face, visiblement Russe, pourrait le comprendre ou non. Il planta à nouveau son regard dans celui égaré du Russe, mais rompit aussi rapidement le contact, soudainement brûlé et gêné par ce regard qu’il ne comprenait pas. «Кто является мной?» Murmura-t-il fébrilement, s’éloignant de l’homme étrange. Etrange journée. S’il ne finissait pas dans un camp de concentration Russe d’ici la fin de la journée, c’est que tout n’était qu’un rêve, un cauchemar peut être et que d’ici quelques heures il se réveillerait bouffant par le nez et tous les pores la poussière de sa carpette.


Traduction:
Aristarkh N. Leonidov
Aristarkh N. Leonidov
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Occupation : Ancien membre de la mafia. Gérant d'un restaurant où je t'assure que tu ne veux pas aller et du bar clandestin dans son sous sol où tu rêves de pouvoir poser ton derrière fortuné.
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MessageSujet: Re: Toute forme créée, même par l'homme, est immortelle. - Chark   Toute forme créée, même par l'homme, est immortelle. - Chark EmptySam 14 Sep - 18:05


La fidélité est un vice de pauvre.
Charles feat Arik.

 



De l'air. Il me faut de l'air. Noyé. Je reprends conscience, lentement, difficilement. Je me réveille après une minute d’apnée après une soixantaine de secondes qui me paraissent avoir duré des années. Je ne suis plus en charge de moi même. Le panneau de bord est totalement immergé alors que le navire coule. Je viens de heurter l'iceberg. Cet iceberg n'aurait pas du être là. Il n'était pas sur le plan, on ne me l'a pas signalé, personne ne m'en a parlé, il ne doit pas être là, il ne doit pas exister et pourtant je le heurte de plein fouet, trop vite, trop fort. Face à face avec le fantôme pâle. Je n'ai pas assez de canots de sauvetage, je le sais, je ne pensais pas en avoir besoin, je ne pensais plus en avoir besoin. Je les ai déjà tous utilisés la dernière fois, pour me maintenir à flot, pour empêcher le froid de me dévorer tout entier, pour empêcher mon cerveau de finir de s'atrophier totalement, pour m'échouer dans la boue. Miraculeusement je trouve une bouée, cadeau inespéré d'un navire qui a plus de ressource que je ne l'aurais soupçonné. Je m'accroche, avec la force d'un désespéré. Comme un fou. Je suis fou. J'ai des visons. C'est nouveau ça. Il m'est déjà arrivé tout un tas de choses mais ça jamais, voir les morts c'est une grande nouveauté. Je contemple mon iceberg. Il est beau. Il est abîmé. Il est désespérément attirant, aimantant le paquebot. J'écope. Difficilement. Je trouve tout de même la lucidité de renvoyer les jeunes filles qui s'étaient attroupées autour de moi. En anglais, en russe, je ne sais plus, je ne sais pas, je m'en fous. Plus rien de ne compte.

Il y a quelques instants je me délectais de leur compagnie, j'appréciais leur peau suave, j'appréciais leurs lèvres brûlantes et leurs regards fiévreux. Je m'amusais de leur empressement, me satisfaisait de leurs avances maladroites pour certaines et bien trop aisées pour d'autres. Je me laissais porter par le charme russe, par la russe. Elle, elle n'avait pas cet accent bon marché dont se contentaient les autres, elle ne sonnait pas périphérie, ni Bulgare, ni Roumaine elle arborait l'accent chantant de la sainte patrie elle même, elle vous régalait les tympans de cette sonorité particulière des filles de Moscou, un tonalité que j'avais entendu une fois dans ma vie mais qui était assez reconnaissable pour qu'encore aujourd'hui je la reconnaisse, et tandis que son phrasé vous occupait en partie tout ce qu'elle possédait d'autre se chargeait du reste. Je savourais les lèvres parfumées contre les miennes, je pressais mes mains contre le dos de la sublime créature alors qu'elle réduisait toujours plus la distance entre nous, alors que ses consœurs jugeaient qu'elles avaient leur mot à dire dans la conversation également, accent rapiécé ou pas. J'étouffais sous les fragrance soutenues, sous les corps divins et les boucles de cheveux soyeuses.

Et j'avais heurté l'iceberg. Au charme russe avait succédé le magnétisme à la française. J'étais dans un bordel, j'étais entouré de jeunes slaves de familles sûrement plus ou moins recommandables, j'étais chez moi, j'étais en lieu sûr, j'étais à l'abri. Pas de lui. Pas des fantômes. Pas des morts. Les morts ne prennent pas rendez vous, ils ont peut être des créneaux un peu compliqués pour descendre de l'au delà, le couvre feu est pas forcément évident là haut. Alors il débarquait maintenant, entre deux bières célestes, entre deux parties de cartes garanties spéciale macchabées, il descendait me rendre une visite. Pourquoi moi ? Pourquoi maintenant ? C'était si difficile que ça d'obtenir un visa pour l’Amérique depuis le trente sixième dessous ? Pourtant l'Amérique c'est pas le pays où c'est le plus difficile de s'incruster. Il m'avait fait attendre si longtemps. Sept ans. J'avais fait mon deuil. Je l'avais chassé de mes pensées, je l'avais chassé de mes rêves, ça avait été dur. J'avais réussit pourtant, grâce à Charles, l'autre Charles, grâce à Baudelaire. Celui là aussi il mange déjà les pissenlits par la racine. Je le dévisageai, incrédule. Peut être qu'il fallait attendre d'accéder au statut d'ange pour pouvoir apparaître à ceux qui peuplent encore la terre. C'est peut être ça. Sûrement. Oui. C'est ça. C'est un ange.

Un ange. Pas la catégorie ange de bas étage ou version moins de dix huit ans. Non. C'était pas un petit cupidon dodu enveloppé dans un drap blanc et plus ou moins nu. C'était un ange magnétique, un ange terriblement sexy et bien trop beau. Un ange imparfait aux traits durcis et bien trop fatigués. Un ange éprouvé et blessé. Il n'avait pas d'ailes, rien pour repartir, il allait peut être rester avec moi alors, finalement on me le rendait peut être. Si ça se trouve c'était pas un bon ange, il était trop intelligent, trop humain, peut être qu'il répondait pas aux critères, peut être parce qu'il avait pas de boucles blondes. Alors ils me le rendaient. Je souris brièvement. Le masque froid de stupeur retomba cependant bien vite sur mon visage. Non. C'était impossible. J'étais fou, je divaguais, les morts ne redescendent pas sur terre, les morts sont enterrés et ils y restent. Charles est mort. Ce n'est pas Charles. Pourtant qui d'autre ? Qui d'autre pourrait me toiser avec cette noblesse française entachée par la guerre ? Qui d'autre pourrait fixer sur moi des yeux aussi profondément dévorée par le spleen ? Qui d'autre pourrait me faire cet effet là si ce n'est l'homme que la tranchée m'a offert pour me le reprendre trois ans plus tard ?

Je laisse échapper son nom alors que le mirage persiste. Le rêve ne se dissout pas. Il est toujours là. J'ai beau cligner des yeux il me fait toujours face. Il n'y a plus que lui et moi dans la pièce. Peut être uniquement moi en réalité me souffle ma raison mais mes yeux, ou du moins mon cerveau, me crient le contraire, ils me montrent un homme. Après tout je n'ai jamais vu son corps, après tout je n'ai jamais eu confirmation de sa mort, après tout il pourrait très avoir seulement disparu. Il a peut être déserté, comme moi. Mais moi je ne l'aurais pas laissé, jamais. Il n'a peut être pas eu le choix. Ou peut être qu'il est mort. Seulement les morts ne se laissent pas troubler, or le regard incertain que Charles me lança en disait long sur son égarement. Il m'avait reconnu, il avait reconnu ma voix, ce nom, il savait qui j'étais. Pourtant il semblait perdu. Peut être que lui aussi me pensait mort, peut être que c'était pour ça qu'il ne m'avais jamais recherché, mes yeux s'illuminèrent à cette pensée. Oui ça devait être ça. Ça ne pouvait être que ça. L'espoir retomba vite. Charles était vivant. Charles parlait, les morts ne parlent pas. Charles se payait ma tête. Si je le connaissais ? Il se moquait de moi ? Je le fixai d'un œil de plus en plus déconcerté alors que je tentais en vain de chercher un signe dans ses prunelles d'un bleu absolu. Il était agressif, ça ne lui ressemblait pas, et moi j'étais incapable d'émettre le moindre son. Nous nous dévisagions en silence, attendant chacun une réponse qu'aucun ne semblait disposé à donner. Avant que j'ai eu le temps de réaliser ce qui se passait je me retrouvai plaqué contre le mur, la main brûlante de Charles sur mon torse, son visage si près du mien. J'étais impuissant, mon corps ne répondait pas, je n'avais pas fait un seul geste pour tenter de le maîtriser, de l'empêcher d'exercer sa violence, mon esprit refusait toujours d'admettre la réalité de ce que mes yeux lui envoyaient désespérément. Je restai interdit sous le contact de mon ancien amant, tétanisé par des souvenirs que j'avais préféré oublier, immobilisé par la proximité de son être. Il me souffla son haleine chargée en alcool alors qu'une nouvelle question, en français cette fois, franchis ses lèvres. Le français. La langue de Charles, la langue de l'amour, la langue de Baudelaire, notre langue. Il la reposa en russe, me permettant de réaliser ses mots. Comment ça qui était-il ? C'était quoi ce cirque à la fin ? Il avait pas bientôt fini son petit numéro celui là ? Il s'éloigna de moi, lentement, fébrilement et je détendis mon corps jusque là crispé par l'étreinte de l'ancien soldat. Je le regardais, il était fou. J'éclatai d'un rire nerveux. Un rire respirant la folie, un rire qui s'évanouit bientôt dans le plafond de la pièce alors que je me redressais, alors que je reprenais contenance et rajustais rapidement mon costume. Il me semble oui que nous nous connaissons. Tu veux le nom complet ou cette question a une visée plus existentielle ? lui demandais-je en parfait français avec un accent russe néanmoins assez marqué et un rictus amer au coin des lèvres, j'entrais dans son jeu, mais je ne savais pas à quoi il jouait, je ne savais pas pourquoi il faisait comme s'il ne me reconnaissait pas. Charles n'avait jamais été le mec le plus drôle que je connaisse mais manifestement son humour n'avait pas été en s'améliorant. J'entrepris de fumer une cigarette. Oui. C'était une bonne idée. Relevant les yeux sur mon plaisantin de compagnon je lui en proposai une. Une cigarette ? Ou ça non plus tu sais plus ce que c'est ?

Charles E. Duval
Charles E. Duval
AND ALL THAT JAZZ
Missives : 1180 Points : 369
Avatar : James Mc Avoy Crédit : © Blondie
Âge : Une petite trentaine il pense.. Mais rien est vraiment sûr.
Statut : Il est persuadé qu'il a été marié, mais personne n'est venu le réclamer, il se considère donc comme célibataire, d'autant plus qu'il se souvient pas de sa femme.
Occupation : Gère une maison close glauque - ouvreur au théâtre
Gramophone : Je bois et puis je danse - Aline
Doubles-comptes : blonde hyperactive et violente pour vous servir.
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MessageSujet: Re: Toute forme créée, même par l'homme, est immortelle. - Chark   Toute forme créée, même par l'homme, est immortelle. - Chark EmptyLun 16 Sep - 20:32


La fidélité est un vice de pauvre.
Charles feat Arik.

 



Il se heurte. La bombe explose, la boue surgit de nul part, vole, et retombe, s’écrase, lourde et sanglante, puante et glissante. L’air devient lourd, irrespirable. Les poumons s'atrophie, la gorge se resserre, le cerveau se crispe, souffre, s’endort, meurt. Les éclats d’obus gise partout dans sa tête, dans son crâne, dans sa mémoire. Ca gesticule, ça se heurte sans cesse, il ne parvient pas à les enlever. Il voudrait crier, secouer la tête, s’en sortir. Mais ça fait mal. Horriblement mal. Ca explose sans cesse dans sa tête, de toutes les formes, de toutes les tailles, les obus l’entame, l’écrase, le détruise. Il voudrait en finir. Il s’assène une tape violente sur l’oreille, comme pour refaire sortir les obus par l’autre. ll ne se rend pas compte qu’il a de la compagnie, qu’il n’est pas seul, que tout son petit stratagème peut être étrange. Il est étrange. Il s’en fiche. Il est chez lui. Il se meurt. Tout explose dans sa tête. Et le coup empire tout. Ca raisonne et sa vibre, des cris, des milliers de cris, tout vibre. Tout meurt. Il grimace. Utilise ses mains pour prendre sa tête en étaux. Il déteste ça, se sentiment d’impuissance, cette douleur lancinante qui l’attrape, l’emprisonne. Il aimerait y échapper, mais la cause en est aussi son remède. Sans le remède il n’en aurait jamais la cause, mais sans le remède il ne guérirait jamais non plus. Pour quelques gouttes, centilitre, décilitre d’alcool, il oublie, un instant. Il oublie son cerveau ravagé, son incapacité à se coucher sans sursauter, sans entendre sa rotule explosé dans une douleur alarmante, sans sentir son cerveau suffoquer, son âme s’évanouir. Il oublie qu’il a tout oublié, qu’il n’est rien. Rien qu’une fraude de lui même, un mensonge inutile qu’il vend à tout le monde, à défaut de pouvoir vendre la vérité. Pour quelques moments d’oublie il vit l’enfer. Le vrai. Le souvenir terreux, le cerveau qui rejette la responsabilité de telles actions, le foie qui se retourne, encore et encore, la guerre qui revient, comme composante unique de sa mémoire, comme seul chaos qui traîne encore dans sa tête.

Il refait surface, doucement, péniblement, abattu et perdu. La gueule de bois le tue. Il survit. Il n’est qu’un fantôme. Qu’un être vide, creux, et inutile. Il tire sa seule consistance du flot d’alcool qui coule dans ses veines soirs après soir, des vers de Baudelaire qu’il crache sans réfléchir désormais, parce qu’il n’existe que par eux, qu’il les connait par coeur. Mais il est loin d’être Baudelaire. Il n’est que Charles, Edgar, Ed, Monsieur Ned, une pâle copie. Un pâle rien. Un bout de néant que l’on repère à la fumée de cigarette, à l’odeur de liqueur. Il tend à s’effacer. A disparaître. Chaque jour lui amène son lot de considération, mais lui rappelle trop vivement ce qu’il est. Ce qu’il n’est pas plus précisément. Il regarde l’homme. L’homme qui ne lui dit rien. L’homme dont le visage se décompose. ll aurait du le connaître. Il le sait. Il le sent. Ca le bouffe. Il se sent disparaître, comme une pellicule de film qui brûle dans la salle de cinéma détruisant l’histoire les personnages. Tout. Moment incertain ou le temps nous échappe, ou nos blancs s’entrechoque, perdu, refusant d’assimiler l'inassimilable. Le visage de Charles se crispe, ses sourcils se froncent, sa mâchoire se serre, son regard s’affine comme si cela pouvait lui permettre de saisir un détail. Le détail qui ferait revenir tout le reste. Une vague le pénétra, le noyant de souvenir vide qui aurait du le submerger. Mais il n’y avait rien. Rien qu’un sentiment désagréable. Une lourde tâche sombre dans un univers déjà bien noir. Une brûlure. Un je ne sais quoi qui se remarque, mais qui ne veut rien dire. Charles avait beau tendre le bras, forcer sa mémoire il ne parvenait pas à ouvrir la bonne page du livre. Ou alors avait-il simplement peur de se rendre compte qu’elle aussi, comme toutes les autres, était blanche. Pour un soit-disant poète, la page blanche était un comble, Charles en était plein. Et l’homme ne semblait pas le comprendre. L’homme ne suivait pas. Il ne comprenait rien. Probablement anesthésié par la colère sourde de Charles, l’homme ne prononçait pas mot. Il sentait pourtant son fantôme se matérialiser progressivement dans les yeux de l’homme. Mais la compréhension ne venait pas avec la chair. Sa chair qui ne correspondait plus à rien. Il n’était qu’un être dans l’univers. Une personne perdu, jamais retrouvé, à des kilomètres de chez lui, sans savoir ce que ça pouvait être. Charles explosa. Comptait-il l’ouvrir un jour ? Réagir peut être. Après tout c’était l’homme qui avait les cartes en main. Lui qui le connaissait. Lui qui était venue rompre son quotidien plat sans souvenir en l’appelant Charles. Personne ne l’appelait Charles. Lui même ne s’appelait pas Charles. Comment pouvait-il s’amuser à ce petit jeu ? L’appeler, et le laisser. Le regarder avec cet air ahurit ? Oui il était Charles. Mais bon sang, qui pouvait être ce Charles ? D’un geste de folie pur, d’agacement profond, il plaqua l’homme contre le mur, écrasant sa main sur son torse. Il s’énerva. Sa tête trembla sous les secousses de rage. Ses jambes voulurent lâcher sous son poids. Il se rattrapa sur le torse de l’homme, lâchant un discours qui était peut être des plus incompréhensible. Mais pensait-on à lui dans l’histoire ? Peut être était-ce légèrement difficile de comprendre que quelqu’un puisse avoir oublier. Mais ça l’était d’autant plus d’avoir oublier. De vivre depuis sept ans sans mémoire. Oui si on lui demandait, il avait sept ans. Mais là, il s’attendait à un éclat de rire général. Il sentit le corps de l’homme se crisper sous sa main, comme tétanisé. Lui faisait-il peur ? Mal ? Il ne fallait pas abuser. L’homme était robuste, bien plus que lui. Il sentait la naissance de ses muscles sous ses doigts et l’homme n’avait clairement rien à envier à personne. Pourquoi toute cette tension ? Son estomac se noua, ses pupilles vrillèrent, son cerveau s’effondra à grand fracas, ses épaule marquant la secousse reçue à l’intérieur de sa caboche. Il s’éloigna fébrilement, risquant de s’évanouir à chaque pas, réveillé brutalement par un rire strident. Strident et nerveux. Nerveux et jaune. Abominable. Charles ferma les yeux, essayant de faire abstraction du rire qui lui entamait sa gueule de bois. L’homme ne voulait-il pas se la fermer ? N’était-il pas suffisamment clair comme ça, qu’aujourd’hui, comme tous les autres jours, que Charles était au trente sixième dessous ? Non après avoir jouer au muet, il jouait au fou. Ils faisaient une bonne paire. Il me semble oui que nous nous connaissons. Tu veux le nom complet ou cette question a une visée plus existentielle ?  La voix de Charles s’écrasa au fond de sa gorge. Sérieusement ? Il trouvait sa drôle. Il osait vraiment se foutre de sa gueule de la sorte ? Charles remarqua à peine la langue qui venait d’être empreinté, nullement choqué que l’homme puisse parler et Russe et Français, comme lui. Tout semblait naturel, qu’il ne sentit qu’une colère sourde l’envahir à mesure qu’il prenait conscience du manque de considération que lui donnait l’homme en face de lui. Il s’était laissé aller, baissant sa garde, marquant sa faiblesse, son amnésie, sa honte, et l’homme lui riait au nez. Il aurait pu l’ignorer. Signer la mort de Charles, et ne pas se retourner. Après tout Charles était mort. Il n’avait aucune idée de qui pouvait bien se cacher derrière les traits de Charles. Il ne pouvait pas agir comme s’il était ce Charles que l’homme appelait. Il aurait pu retourner dans son bureau pour cuver son alcool et son malêtre. Mais il s’était abaissé, avait crevé l’abcès, avait voulu savoir. Et voilà ce qu’il récoltait. Les yeux de Charles s’arrondirent comme des soucoupes, la rage rayant sa gorge de toute sa puissance. Sa voix gronda sur les murs miteux de la maison close. «Existen-quoi ?» Bien sûr qu’il comprenait le mot. C’était sa langue maternelle que l’homme avait employé, il ne pouvait pas ne pas comprendre. Simplement il était trop choqué de cette connerie sans fond pour pouvoir réagir de manière parfaitement logique. «Est-ce que j’ai une tête à avoir des débats existentielles sur moi même, sombre idiot ?» La réponse était oui, bien sûr. Charles avait toujours eu cette allure fière du Dandy Parisien, animé par les vers du plus grand poète maudit de tous les temps. Exactement le genre de personne qui s’asseyait autours d’un verre et qui parlait de l’existence, de son existence, en bon égocentrique. «Crois moi je suis ravis que tu trouves tout ça très drôle... Mais si tu pouvais ravaler ton sale égo de russe que je ne reconnais pas, pour remplir la coquille vide que je suis de tes... Enfin nos souvenirs... Tu auras...» Qu’est ce qu’il pouvait bien lui donner ? Il avait rien envie de lui donner. L’homme était un con. Un con qui se foutait de sa gueule. Et Charles n’aimait pas ça. Il n’y avait qu’une chose qu’il faisait avec les cons. Et cette chose se situait dans son pantalon. Tirant un sourire fêlé, il attrapa quelque chose dans le dos de sa ceinture et sortit un revolver. D’un geste rapide il ouvrit le chargeur, une balle brilla devant les yeux des deux hommes, d’un geste bien trop habile, Charles fit tourner le chargeur avant de le refermer d’un coup sec. «L’honneur de tirer en premier.» Il fixa ses yeux dans les siens. Se rendant compte qu’il n’y avait aucun but à ce petit jeu. Simplement que l’homme l’avait agacé, et que Charles avait développé des réactions très évidente pour lui, hors de contrôle pour les autres, dans ce genre de situation. L’homme ne comprenant toujours rien à l’affaire, et tira paisiblement une cigarette de son étuis, en proposant une moqueur à Charles qui perdit ce qui lui restait de son sang froid, de sa logique. Incapable d’entendre un mot qui pourrait le rassurer, l’aiguiller sur ce qui se passait, sur la personne qui lui faisait face, il eut un geste vif et inconsidéré. On vit son poignet portant l’arme s’élever d’abord vers l’homme, avant de se retourner d’un coup vif contre lui même, de se coller le revolver sur la tempe, et d’appuyer sur la détente, les yeux grands ouvert, le coeur en suspend. Le bruit partit, léger, suivit d’une vague odeur de poudre, résidus des anciens coups. Charles était toujours droit dans l’entrée de sa maison close, le regard froid, fou, et vide, les mains résolument rigide malgré son geste. «arrêtons de jouer, veux-tu ?» dit-il faiblement à l’homme, comme si le bruit qui venait de lui ravager le cerveau l’empêchait désormais de parler plus fort que ça. Il attrapa la cigarette toujours tendue vers lui, la porta à ses lèvres et s’approcha du briquet allumé porté par l’homme. «Dis moi qui tu es. Et qui je suis par la même occasion»
Aristarkh N. Leonidov
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MessageSujet: Re: Toute forme créée, même par l'homme, est immortelle. - Chark   Toute forme créée, même par l'homme, est immortelle. - Chark EmptyMer 18 Sep - 21:00


La fidélité est un vice de pauvre.
Charles feat Arik.

 



Tétanisé. J'étais incapable de bouger. Je ne pouvais pas. Je ne pouvais plus. Sa main faisait fondre ma peau. J'étais l'esclave de mon corps. L'esclave du désir et des souvenirs. Comment pouvait-il supporter cette proximité ? Comment pouvait-il faire se rencontrer nos corps ainsi ? N'avait-il donc aucune pitié. Je partais à la recherche de son regard alors que ses doigts heurtaient le torse d'un homme et non celui d'un gosse encore trop sensible pour affronter la vie. À l'époque déjà j'étais musclé. Je l'avais toujours été. Beaucoup. Grâce à la danse. Aujourd'hui encore plus, parce que je me maintenais en forme, parce que je n'avais pas le choix. Je cherchais mais je ne trouvais rien. Il n'y avait pas de trouble et ma fébrilité ne trouvait aucun écho dans le regard azur dévorant du français qui ne faisait que me renvoyer mon propre reflet, qui ne faisait que me montrer le fantôme qui habitait mes globes oculaires. Je ne dirais rien. Je ne pouvais pas. Je n'en étais pas capable. Mes lèvres ne pouvaient rien prononcer, pas avec les siennes si proches, pas avec ses bras aux muscles tendus me déstabilisant alors qu'il se retenait plus ou moins à moi. Il avait faillit chuter. Il était loin d'être sobre. Il me soufflait ses bouffés d'alcool au visage. Ça ne me dérangeait pas. Pas plus que ça. Je ne voyais que lui. Je ne voyais que l'enveloppe de Charles servant de pantin à un homme qui n'était pas lui. Charles n'aurais pas réagit comme ça. Charles n'était pas violent, pas autant. Charles ne m'avais jamais regardé ainsi.

Les flashs me meurtrissaient le crâne. Mes temps me démangeaient. Je voyais la terre, je voyais la boue, la merde et le sang. Je voyais le monde en marron et rouge. Je baignais dans l'Apocalypse. Nous étions tous des anonymes. Des hommes méconnaissables au masque de crasse, aux blessures potentiellement fatales. Je voyais l'uniforme, la conformité d'une armée, l'union d'une nation. Je n'entendais plus rien. Je ressentais les secousses, je ployais sous la violence mais je n'entendais pas les cris, je ne captais pas les bombes, ni les supplications. Je voyais Charles. Je voyais ses yeux. Toujours les même. Dans cette maison close ou dans la tranchée je me retrouvais face à la pureté céleste matérialisé dans ses pupilles, inchangées, seulement ternies. Je ne l'avais jamais vu dans un environnement pareil. La guerre avait été notre cocon, les tranchées notre quotidien. Il en avait fait un havre, il nous avait isolé, auprès de lui je pouvais supporter les raids dont on ne savait jamais si on reviendrait, je savais qu'il serait là. Nous étions devenu des papillons, nous avions délaissé notre enveloppe, nous habituant à l'environnement hostile, acceptant que l'on aurait rien de plus, rien de mieux, mais qu'importe, j'avais Charles, j'avais Baudelaire, je n'avais plus besoin de rien. Il avait été touché en plein vole. Un trou béant dans son aile lumineuse, le clouant au sol, lui arrachant son chatoiement. L'azur de son regard avait disparu, le ciel était redevenu noir, les nuages s'étaient chargés, ils m'avaient lavé, lavé de l'espoir, lavé de la vie, lavé de l'amour. Seul. Je voyais le monde. Vraiment. Je me réveillais. Le songe avait été beau, il avait été doux. Il était fini. Je ne dormais pas et puis le son est revenu. La fréquence a été rétablie. J'ai entendu les cris, j'ai frémis au craquement des bombes. J'ai vu la mort. J'ai oublié la vie. J'ai ouvert les vannes et je me suis laissé submerger. J'ai ressenti la peine. J'ai ressenti la douleur. J'ai ressenti la haine. Jusque dans mes os, jusque dans ma moelle. J'ai joué d'avantage, gagnant toujours plus, aspirant les derniers souffles de mes malheureux adversaires.

J'ai lu Baudelaire. Pour apprendre ce qu'on ne m'avait jamais inculqué. Pour tenter de gérer ce que je ne savais pas où mettre. Je ne pouvais pas. Je n'allais pas survivre. J'étais une éponge humaine, un puits à sentiments sans fond, absorbant tout ce que le monde pouvait bien relâcher. Nuage toxique. Fumée nocive. Déserteur. Je veux vivre. Grâce à Charles. Pour Charles. Charles sont morts. Ils m'ont laissé ce qu'ils avaient de plus beau. Je ne retiendrais que leurs mots.

Je reprends vie. Mon corps s'anime à nouveau. Comme si une fois loin de moi j'avais à nouveau le droit de penser que son regard lointain allait s'illuminer. Comme si une fois qu'il ne m'obligeait plus à lire la vérité dans son être trop près du mien je pouvais à nouveau en faire abstraction. Il était loin. Trop loin. Mon esprit incertain voulait qu'il disparaisse, mon corps voulait réduire à néant la moindre distance qui pourrait tenter de s'insinuer entre nous. Je n'étais pas sérieux. Rien de tout cela ne l'était. Charles était mort et tenait une maison close. Je devenais fou. Je sombrais. J'avais trop bu, c'est pas grave, demain je me réveillerais, demain je jouerais. Demain je gagnerai et je saurais alors que j'ai rêvé. Cauchemar ou rêve. Ça n'a pas d'importance. Je sombre. Je me noie dans un verre de scotch, je divague sur mon bureau, je vois les morts, j'invoque l'amour. Il était sonné, choqué par le contact. C'est normal Charles. Pourquoi ne semblait-il pas comprendre ? Pourquoi ne voyait-il pas ce qui le rongeait, pourquoi ne sentait-il pas ce qui me dévorait de l'intérieur, ce qui me gangrenait l'esprit ? Les morts ne ressentent peut être pas le désir. Mais ses yeux. Un instant, une seconde. Une étincelle. Plus rien. Je ne riais plus. Ma folie n'était pas drôle. Mes visons étaient dégoûtante, mon hallucination était faible.

Charles non plus n'était pas drôle. Il se crispait. Il me fixait, les yeux écarquillés, la bouche semi béante alors qu'une rage puissante franchissait ses lèvres. Ne te fais pas plus analphabète que tu ne l'es Delancastre, tu sais très bien ce que ça veut dire, c'est toi le français ici, pas moi. J'aimais sa voix. «Est-ce que j’ai une tête à avoir des débats existentielles sur moi même, sombre idiot ?» T'as surtout l'air bien torché pauvre type. Je sentis mes muscles se bander. On ne m'avait pas traité de sombre idiot depuis longtemps. Soit. Je ne répondis rien. Observant mon interlocuteur, fasciné par l'agressivité et le désespoir qui semblaient le maintenir debout. N'importe qui aurait souffert pour ce manque de respect, mais c'était Charles, et puis il n'était pas vivant, je n'étais pas sûr qu'il puisse ressentir la douleur. Je n'écoutais que d'une oreille discrète ce qu'il me racontait, je l'observais, je le jaugeais, j'ajustais ma tenue, froissée par ses mains, je passais la main dans ma chevelure courte soigneusement ordonnée. Vide. Noir. Je m'arrête. Je le fixe. Je ne cille pas. Je suis le russe qu'il ne reconnaît pas. C'est impossible. Je suis moi, il est lui et je le sais, il le sait aussi. Il ne peut pas ne pas me reconnaître, il fait partie de moi, il ne peut pas m'avoir oublié, il faudrait qu'il se soit oublié lui même en cour de route. Je n'avais pas conscience qu'on fasse un lavage de cerveau aux nouveaux arrivants du paradis. Dans ce cas pourquoi me le restituer ? Vide il n'était plus lui. Je n'en voulais pas. Ou peut être que si. J'étais glacé par cette pensée. Il m'avait oublié. Comme mon père. Je ne comptais pas, je ne comptais plus, même pour lui. Je n'étais pas assez important, je ne l'avais pas marqué, il m'avait juste balayé quand il en avait eu marre. Peut être qu'il n'était pas mort alors. Peut être qu'il était parti parce qu'il ne voulait plus de moi et la minute d'après je n'existais plus, il m'avait banni de sa mémoire. Je finis de me briser. Brutalement. Douloureusement. J'ai mal. Il me fait mal. Tout chez lui est souffrance. De ses lèvres à son regard. «L’honneur de tirer en premier.» Charles avait sorti son revolver. Charles était fou. Ce revolver c'était Charles, c'était moi, c'était nous. Une balle. Toujours. Il n'en mettait jamais plus. J'eus une pensée pour ma propre arme sur mon flanc, chargée de trois balles. Je souris. Il y avait peut être de l'espoir en fin de compte. Charles était devenu con. Il était devenu aigri et amer. Mais je n'y pensais plus. Je ne voyais que lui. Je ne voyais que cette arme. Je ne voyais que la balle qui pendant quelques secondes avait brillé sous mes yeux, je ne voyais que le jeu. Je ne ressentais plus que l'envie, le besoin. C'était comme avoir soif. Comme sentir des lames se loger dans votre gorge quand tout ce que vous désiriez était une goutte d'eau. Mon esprit était transpercé, éventré, esclave de l'adrénaline, esclave de cette dose que j'avais déjà trop repoussée.

Une lueur. Lucidité inespéré alors que les mots allaient enfin franchir mes lèvres. Je ne peux pas jouer. Pas avec Charles. Je n'ai jamais perdu. Je ne perdrais pas. Je ne veux pas. Je ne peux pas. Je ne peux pas mourir, je ne peux pas assister à la mort de Charles, je n'ai pas besoin de séance de rattrapage pour la première fois que c'est arrivé. Les morts peuvent-ils mourir ? Charles n'a pas neuf vie. Je ne jouerais pas avec lui. La revolver m'attire. Je sors un étui plat en fer ouvragé. Des cigarettes. De la nicotine. Je dois remplacer une drogue par une autre, soulager mon esprit, n'importe comment, avec n'importe quoi. Il le faut. Je ne peux accepter. Je lui en proposai une, il devait se calmer, il était à cran et il allait finir par m'agacer. Il contemple le bâtonnet d'herbe que je lui tends. D'un geste presque automatique, il plaque le canon contre sa tempe. Il actionne la détente. Je ne bronche pas. Je le contemple. Camé qui n'est plus choqué de voir qui que ce soit se piquer devant lui. Mon cerveau déraille. Un pic de manque se fait ressentir. Alors que l'homme est toujours en face de moi et que l'odeur de poudre me chatouille les narines. «arrêtons de jouer, veux-tu ?» dit-il faiblement, à demi sourd, totalement défoncé. Il se fout de ma gueule lui ? Mon sang ne fait qu'un tour, d'un mouvement brusque et rapide je sors mon revolver et d'un mouvement mécanique du poignet je l'ouvre et en fait tomber une balle, n'en gardant que deux dans le barillet. Mon poids préféré. Je fais tourner. Je m'approche de lui et l'empoigne à mon tour violemment, le plaquant contre le mur le plus proche. Je ressens mon arme, j'entends le système qui s'enclenche alors que la balle est logée dans le compartiment du haut. Il n'y a que toi qui joue ici Charles. Je lui plaque le canon sous la gorge. Mais il n'y a pas que toi qui t'y connaisses là dedans, et que tu fasses ton petit numéro au premier venu je veux bien mais à moi c'est un peu fort. Tu as entendu toi aussi? Je presse un peu plus l'arme contre sa peau. Oui. Il est chargé. Tu ne me crois pas? Je lève le bras et tire dans le plafond. Une légère pluie de plâtre nous tombe dessus. Bien sûr qu'il était chargé. Je relâche le garçon. Il me reste une balle. Il me la faut. J'actionne à nouveau le barillet et tournant le dos à mon compagnon, je presse le canon contre ma tempe, j'essaie de ne pas écouter, je ne veux pas savoir, je veux cultiver le suspens. L'inévitable arrive. Je suis toujours en vie. Je range l'arme et lui fait face à nouveau. Bien. Je respire à nouveau. L'adrénaline se répand dans mon organisme alors que mon cœur se remet à battre. Je sors une nouvelle cigarette. Je l'allume et inhale la fumée âcre, tendant au français mon briquet. Partage du feu. Retour aux origines. «Dis moi qui tu es. Et qui je suis par la même occasion» Je tire trois lattes, calmement, sans me presser. Et puis je plante mes yeux dans les siens. Il a raison. Ça suffit. Assez joué. Aristarkh Nikolaevitch Leonidov. Tu m'appelais Arik. Je marque une infime pause, le temps d'inspirer une nouvelle taffe. Quant à toi tu étais Charles Hippolyte Delancastre. Mais tu es mort.

Charles E. Duval
Charles E. Duval
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Statut : Il est persuadé qu'il a été marié, mais personne n'est venu le réclamer, il se considère donc comme célibataire, d'autant plus qu'il se souvient pas de sa femme.
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MessageSujet: Re: Toute forme créée, même par l'homme, est immortelle. - Chark   Toute forme créée, même par l'homme, est immortelle. - Chark EmptyJeu 19 Sep - 22:30


La fidélité est un vice de pauvre.
Charles feat Arik.

 



J’aurais du être heureux. J’étais vivant. Bien plus vivant que beaucoup. Je me suis réveillé. Ca aurait du être suffisant. Pour beaucoup ça avait été suffisant. J’en avais vu certain, heureux d’être là, estropier comme il ne pourrait jamais sans remettre, mais heureux. Comparé à eux, j’aurais pu être un homme délicieusement heureux. J’étais vivant, presque pas atteint physiquement, mise à part une vieille balle qui faisait grincer un genou désormais défectueux. Je n’avais qu’un véritable problème. Celui de ne me rappeler de rien. D’être un orphelin de mémoire, un nouveau né d’un âge déjà bien avancé. Mais j’aurais du être heureux. J’avais le droit à un nouveau départ. C’était ce que beaucoup de gens espérait. Un nouveau départ. Je n’avais presque pas à me souvenir de la guerre. Je n’avais qu’un rêve qui me trottait en tête, celui de ma mort... Qui n’avait même pas vraiment eu lieu. Je n’avais pas à me plaindre, je ne revoyais pas mes anciens compagnons mort au combat, je ne ressentais pas toujours les obus renverser les vivants et les morts, je ne sentais pas les baillonnettes nous empoigner la chaire, je ne sentais pas la boue ou l’odeur du sang dans la bouche. Je ne sentais qu’une balle bien placée, qu’une explosion dévastatrice, et mon corps qui se meurt, qui s’asphyxie dans la boue. Et puis le noir. Et c’était tout. J’avais de la chance. Beaucoup de chance. J’aurais du être heureux. Comparé à beaucoup qui l’était sans raison, j’aurais du être heureux. J’aurais du être heureux parce qu’il était là. Je n’avais beau ne plus savoir qui il était, j’aurais du être heureux de sa présence. Je le sentais. Au fond de moi, au plus profond de mes tripes. Sa présence aurait du me satisfaire, me combler. J’avais l’impression que je n’aurais du attendre que ça; de le revoir.

Mais je n’étais pas heureux, et je ne ressentais rien de tout ça. J’étais vide. Complètement vide. Et son regard m’asphyxiait. Je suffoquais. Ses yeux pénétrants me transperçaient le regard, me foudroyait dans ma solitude. Je ne comprenais rien. Un regard ne pouvait pas autant me gêner, me détruire. Je me sentais brûler de l’intérieur. Coupable. Coupable de l’avoir oublié subitement. Alors que rien... Je n’avais rien pu faire. J’avais tout oublié. Lui. Et tous les autres. Et moi même. J’étais vide, impuissant et je suffoquais. Lentement, surement. Ses yeux clairs me transperçaient de tout leur trouble. Il me reprochait tout surement. Je nous avais tué. Je n’avais aucune idée de ce que j’avais fait, de ce que j’avais détruit, mais la culpabilité m’étranglait. J’avais envie d’hurler, d’exploser rageusement en sanglot. Il ne comprenait pas. Le con ne comprenait pas. C’était pourtant clair. Pouvait-il seulement essayer de comprendre ? Arrêter de me regarder comme je ne sais qui, je ne sais quoi que j’étais pour lui et que je ne pouvais pas maîtriser ? Sous son regard je me dématérialisais, j’étais un fantôme de son passé revenu le hanter. S’il savait à quel point je payerais cher pour être hanté par un quelconque souvenir. En quelques sorte depuis le temps je l’étais, hanté, manquant de souvenir traumatisant, j’avais fait en sorte d’en vivre le plus grand nombre. Incapable de reprendre ma vie là on je la recommençais, j’avais juste décidé de tout saccager. Sans le faire exprès, inconsciemment. Mais au final c’était exactement ça. J’avais détruit toutes mes chances. Aujourd’hui je n’étais plus rien, tout aussi vide, un tas de cendre qu’un coup de balais fera disparaître. Je ne pouvais pas être heureux. Je ne comprenais rien. Il me manquait. Enfin je le supposais. Mais plus que lui c’était le sentiment de manque qui me manquait. Je voulais qu’il me manque. Je voulais qu’il me fasse mal. Lui ou un autre ça n’avait pas d’importance. Mais c’était lui qui était là. Alors lui ferait l’affaire.

A présent je ressent toute la pièce autours de moi, le délabrement dans lequel je la laisse, l’était d’abandon auquel je n’avais jamais prêté attention. Je prend conscience de mes muscles qui se tendent, de la rage qui s’insinue dans mon corps à travers toutes mes veines. Je suis l’esclave de ma colère à défaut de savoir ressentir autre chose. Je suis comme le roi d’un pays pluvieux, riche, mais impuissant, jeune et pourtant très vieux. J’ai surement des trésors inestimables qui me sont dissimulé, je suis un coffre bien gardé auquel je n’ai jamais eu accès. Je suis une carapace vide rempli d’un moi inaccessible. Je ne ressent que la superficialité des éléments qui m’entourent, comme ce roi fade ressent la pluie qui s’écrase sur son peuple. Je ne ressent rien d’autre que ma rage, la poussière, et son regard. Ma rage trouve un échos dans son agacement. Je le sais, je suis son agacement, mais qu’importe, il est ma rage. Je suis un cimetière abhorré de la lune, où comme des remords se traînes de longs vers qui s’acharnent toujours sur mes morts les plus chers. Mais les seuls morts que je possèdes sont mes souvenirs oubliés, enterré avant la fin, comme si je m’étais réveillé en vain, comme si mon corps paresseux n’avait su gagner le paradis, avait fuit des portes de l’enfer, pour se retrouver là, errant et brisé, dans ce vague cimetière de sa mémoire oublié. Il est mort en un sens, en face de moi. Je l’ai tué, oublié, enterré, dépouillé d’un nom, d’une idée, de tout mots, il n’en reste plus rien, rongé par mes vers coupable, je l’ai détruis. Il le comprend, il me regarde, et m’assassine. Je baisse les yeux, de honte, de douleur. Que puis-je faire ? Je n’ai plus d’autre choix. Comme toujours. Il faut faire bouger les choses, actionner la détente, en finir. Cinq chances sur six, on peut dire que je suis petit joueur. Mais il ne faut pas croire, la malchance tombe plus souvent qu’on ne le croit, pas sur moi, sur les autres, mais c’est la même chose, une balle dans la cervelle, la fin des ennuis. Je ne suis pas sûr d’avoir envie que la malchance lui tombe dessus. Enfin je ne sais pas. Peut être que je m’en fiche, je ne le connais pas. Ca n’a pas vraiment d’importance. Cela dit, lui mort, je ne suis guère mieux, je n’aurais jamais les réponses... Je retourne l’arme contre ma tempe, je n’attend pas, je tire. Pas pour aujourd’hui. Je suis lasse. Tout me lasse. Ca me lasse. Le jeu. Ma vie. Tout. Je ne veux pas grand chose, des réponses ou le silence. Tout cogne dans ma tête. Le léger déclic du revolver qui ne m’a pas fait sauter la cervelle, sa respiration trop lourde, la mienne trop faible. Je n’aurais pas tant du boire hier soir. Enfin ce matin. Enfin je n’aurais juste pas tant du boire. J’ai encore oublié une soirée. Une de plus, une de moins, en soit, ça ne me change pas grand chose. Mais c’est ennuyant. Je respire l’alcool, je me donne la nausée. J’ai juste besoin de calme. De calme et de réponse. Pour enfin m’endormir serein peut être. Je m’attends à une réponse. Il pourrait juste parler. Qu’est ce qui l’en empêche ?

Charles vacille. Encore et encore. Ses yeux de plus en plus flou ne se pose sur aucun objet. Il ne s’en rend pas compte, mais enfermé dans son cerveau qui ressasse sans arrêt les mêmes conneries, il s’effondre doucement, ses jambes menaçant de ne plus le porter. Son regard devient flou et vague, de toute façon il ne regarde plus rien. Seul le geste désespéré et violent de l’homme qui lui fait face vient le réveiller. Brutalement bloqué contre le mur, Charles se réveille péniblement de sa transe alcoolisée, la douleur de la main sur sa poitrine lui étreint la gorge, il ferme les yeux à plusieurs reprise pour essayer de reprendre l’avantage sur son cerveau de plus en plus absent. Seul ses oreilles semblent encore être à l’affut de ce qui se passe autours de lui. Il entend le geste grinçant du poignet de l’homme qui semble tenir une arme. Il comprend ce qu’il se passe lorsqu’il entend le canon se fermer sur le manche de l’arme, et lorsque le clic distingué de la balle chargée raisonne dans ses oreilles. Il ne réagit pas, lorsqu’il sent le canon venir se pointer sous sa gorge. Il cherche juste à trouver de l’air. Il sait pourtant bien que c’est inutile. Si l’homme tire, il n’aura plus besoin d’air. Mais c’est un principe de survit, lorsque l’air vient à manquer, on en cherche, on en trouve. Mais il n'y a pas que toi qui t'y connaisses là dedans, et que tu fasses ton petit numéro au premier venu je veux bien mais à moi c'est un peu fort. Tu as entendu toi aussi? Il ouvre à nouveau les yeux, et fixe l’homme de son regard creux, et absent. Oui il a entendu, il sait. Ne lâchant pas l’homme du regard, il murmure doucement, en anglais, étrangement. C’est pourtant une langue qu’il n’apprécie guère, qu’il ne maîtrise pas parfaitement, et qui n’a visiblement aucun rapport avec l’un ou l’autre des deux hommes, mais c’est comme ça que ça lui vient. Il ne maîtrise pas. «Shoot... I don’t care.» On le lisait déjà au fond de ces prunelles. Il s’en fiche. Vraiment. Il a beau savoir, il accepte. Il accepte toujours. A chaque fois qu’il joue. C’est de toute façon un contrat invisible signé avec l’arme lorsqu’on se la met sur la tête et qu’on tire. A chaque fois, on sait. On sait qu’on peut y rester. Il n’empêche, qu’habituellement Charles ne sait pas. Charles n’écoute plus. Il écoutait. Enfin surement. Parce qu’il sait écouter. Il sait reconnaître le bruit de la balle chargée. Mais il s’en fiche. Quel suspense y a t-on si l’on sait ? Si l’on sait ce n’est plus un pari, c’est un suicide. Et étrangement cette notion le dérange. Il sait bien qu’au fond ce n’est qu’une formalité, qu’il n’y aura pas une grande différence entre mourir d’un accident de roulette russe ou d’une balle simplement logée dans le crâne délibérément. Mais l’infime différence qui réside toujours entre les deux est ce qui lui sauve l’âme. Oui. Il est chargé. Tu ne me crois pas? Il se réveille à nouveau. Bien sûr que si il le croit. N’a-t-il pas lu dans son regard ? Il sait ! Il s’en fiche. Tire. L’arme s’éloigne brutalement de lui et le coup part. Charles sursaute légèrement, du plâtre lui tombe sur la tête. Il est vivant. Encore une fois. Pourquoi ? Pourquoi n’a t-il pas tiré ? Il ferme les yeux. Son coeur se remettre à battre normalement, comme la machine rouillée et grinçante qui l’habite. Ca aurait été tellement simple. Il ne voit pas l’homme se retourner et actionner l’arme contre lui même. Mais il entend. Il sourit. Alors ils étaient ça ? Deux cons cramés à la roulette russe ? Comme ça c’était lui ? Le coupable. Le coupable de son addiction. Si ce n’est pas lui qui d’autre ?

Charles s’affaissait de plus en plus. Doucement mais surement il se sentait glisser contre le mur alors qu’il demandait à l’homme d’abréger ses souffrances et de lui donner une réponse clair. Aristarkh Nikolaevitch Leonidov. Tu m'appelais Arik. Charles resta en suspend, la bouche grande ouverte, essayant d’assimiler ce que vient de dire l’homme. «Arik...» Il le répéta plusieurs fois, à demi voix, essayant de l’imprimer dans sa mémoire, de se souvenir. Mais ça ne trouvait aucune raisonnance. Rien si ce n’est que ça sonnait bien. Que c’était un son qu’il trouvait doux à l’oreille. Qu’il aimait bien le prononcer. «Arik..» Oui il aimait bien... Mais à part ça... Quant à toi tu étais Charles Hippolyte Delancastre. Mais tu es mort. Il accusa une fois de plus le coup. «Charles Hippolyte Delancastre... Un sur trois...» Il avait au moins eu raison quand il avait été persuadé de s’appeler Charles... En revanche Edgar Duval... Pipeau. «Delancastre... Il fronce les sourcils... Il a déjà entendu ce nom quelque part... Mais ou... Il ferme les yeux, son front marque sa crispation, son pouls s’accélère rapidement. Ses muscles se tendent, il se sent mal. Enfermé dans un corps qui ne lui dit rien, avec une identité qui lui revient pas, il voudrait hurler, pleurer, étirer sa peau jusqu’à ce qu’elle craque. Tout le gratte tout le démange, il n’en peut plus. Pourquoi diable ne se souvient-il de rien ? Pourquoi a-t-il tant de connaissance littéraire, et aucune sur lui même ? C’est quoi ce jeu malsain et stupide qu’on lui impose ? Sans s’en rendre compte il se laissa définitivement glisser contre le mur, son genoux grinçant dans la chute. Il étouffa un grognement portant la main à son genoux... «Nan... pas mort... Dans le coma... J’me suis réveillé le 7 Novembre 1917... La tête vide...» il crachait ses mots dans un souffle irrégulier et désagréable. Son coeur se serrait dans sa poitrine, et chaque battement devenait une souffrance inimaginable. Comme un gamin il attrapa sa tête entre ses deux mains et se mit à pleurer. Lentement, surement. Les larmes glissaient sur ses joues, roulant sur ses lèvres, s’écrasant dans sa gorge. Il était à bout. Sept année de vide. Pour rien. Il était persuadé qu’un jour ça le marquerait. Il rencontrerait quelqu’un, qu’il lui suffirait de lire dans le regard de l’autre et qu’il se souviendrait. Il pensait qu’il lui suffisait d’entendre son nom... Mais Charles Hippolyte Delancastre ne lui disait rien. Arik ne lui disait rien. Il devait pourtant être important s’il l’appelait Arik... Il aurait pu l’appeler Aristarkh, il parlait Russe... Ce n’était pas si difficile à prononcer pour lui... Ses épaules sursautèrent régulièrement sous les hoquets de larme qui l’animait. Il ne se souvenait pas de la dernière fois ou il avait pleuré. Mais tout disparaissait en lui. Il était un vide sans fond. «Désolé... je...» Parler était une souffrance, les mots mourraient dans sa gorge comme les les souvenirs mourraient dans sa gorge. «Je ... Je ne sais plus...» Il se mordit la lèvre pour essayer de contrôler les larmes qui secouait son corps trop vieux pour encore pleurer de la sorte. Il voulu attraper son revolver et arrêter ses conneries, mais ses mains étaient bien trop tremblante pour pouvoir enclencher l’arme. Il releva le regard vers Arik, et utilisant tout l’air disponible dans ses poumons il retint un instant les larmes et cracha «Tire... S’il te plait. Charles est déjà mort de toute façon...» il crispa sa main contre son genou, faisant rentrer ses ongles dans son pantalon, entamant doucement la chair en dessous. «Et Edgar Duval n’est rien...Tire.» Ou dit moi, pensa-t-il... Mais il n’eut pas la force de demander. Il était pitoyable. Il ne voulait même plus savoir. Ca ne changerait rien. Ca lui imposerait des souvenirs qui lui paraissaient tous faux... a moins qu’il se souvienne lui même, il n’existerait pas mieux.
Aristarkh N. Leonidov
Aristarkh N. Leonidov
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MessageSujet: Re: Toute forme créée, même par l'homme, est immortelle. - Chark   Toute forme créée, même par l'homme, est immortelle. - Chark EmptyLun 23 Sep - 22:58


La fidélité est un vice de pauvre.
Charles feat Arik.

 



Mon être tout entien agonise à nouveau sous la présence de cet amant arraché. Je ne peux pas. Il ne peut pas me faire ça. Il ne peut pas revenir, il ne peut pas se saisir de moi dans ce bordel de seconde main, il ne peut pas m'infliger de voir le reflet de l'homme brisé que je suis dans ses yeux vides de vie. Il ne peut pas m'obliger à constater les dégâts de la vie, il ne peut pas briser l'utopie. Il n'a pas le droit. Il s'éloigne et je ris. Il me quitte et je perds la tête. Encore une fois. L'histoire se répète toujours. Il perd patience. Je le vois, je le sens, je le savoure. Sa colère est bien le prix à payer pour mon absolution, il détruit la paix de mon âme, qu'il aille au diable.

Je le hais. Je le hais pour l'emprise qu'il a sur mon âme, pour le pouvoir qu'il a sur moi. Je hais mon impuissance face à lui. Même aujourd'hui, surtout aujourd'hui. Je ne suis plus un gosse qui entre tant bien que mal dans la vingtainte et qui se laisse amadouer par le premire jeunot qui passe à sa portée. Je ne suis plus un gamin hypersensible qui ne s'épanouit que dans la danse, qui ne respire qu'entre deux arabesques, qui ne peut réfléchir qu'entre deux crises cardiaques passagères provoquées par le risque de se retrouver avec quelques grammes de plombs dans la cervelle. Si. Ça ça n'a pas changé, ça ne changera pas. Je ne peux plus rien contre ce jeu, contre ce qui est devenu une addiction, contre le manque qui se fait ressentir quand je n'ai pas ma dose d'adrénaline dans les temps. Ça plus Baudelaire. C'est tout ce qu'il me reste. Ses mots et mon revolver, le reste n'est plus. Charles n'est plus. Arik n'est plus. Il est mort là bas. Je l'ai laissé en Russie, je l'ai achevé à Broadway, je l'ai enterré quand la balle a traversé la poitrine d'Olivia. Aristarkh Leonidov. Disparu le surnom, démerdez vous pour arriver à prononcer mon prénom amis anglosaxons.

Pourquoi lui ? Pourquoi Charles ? Pourquoi un homme ? J'étais un homme à femme, clairement. J'avais grandit entouré de ces créatures irréelles aux formes fantastiques. Les femmes étaient belles. Les femmes n'étaient pas nos égales, loin de là, mais elles étaient magnétique. La femme ne sait pas séparer l'âme du corps. Elle est simpliste, comme les animaux. Un satirique dirait que c'est parce qu'elle n'a que le corps. Baudelaire a raison. Il ne faut pas demander à la femmedegrands raisonnement, seulement d'être belle. Il ne faut aps chercher à réellement converser avec une femme, seulement l'admirer. S'extasier devant la perfection de son corps, devant la finition de son enveloppe. Savourer la seule chose en quoi elle serait toujours supérieure à l'homme. La femme dès qu'elle se flatte de voir son cocon disparaître pour révéler des courbes délicieuse devient un chef d'oeuvre, une merveille étincelante. J'aurais aimé être peintre pour figurer leur apparence chimérique, j'aurais aimé être chanteur pour chanter leur beauté, j'aurais aimé être sculpteur pour immortaliser leur perfection, j'aurais aimé être poète pour en une seule strophes railler leur bassesse et ensencé leur somptuosité. J'aimais les femmes, j'étais fasciné par elles, depuis toujours et assurément jusqu'à ma mort. Pourtant il y avait eu Charles. Il avait apporté ce quelque chose inconnu, il m'avait montré le reste. Il avait l'âme, il était l'esprit. Il représentait en lui même une nouvelle forme de perfection, les formes masculines chez lui trouvaient écho dans la splendeur qui toujours chez le sexe faible m'avait bouleversé. C'était la guerre, c'était la mort, c'était la vie, c'était Baudelaire. J'étais tombé amoureux de Baudelaire, j'avais appris ses mots, j'avais chéri ses vers. Charles était Baudelaire, il était beau, il donnait vie au spleen.

Aujourd'hui pourtant ce mal être de l'auteur bohème le rongeait de l'intérieur, je ne pouvais que le constater alors qu'il se tenait face à moi, le revolver sur la temp. C'était de ma faute ça, un peu. Peut être. Sûrement. Il m'avait montré son maître à penser, je l'avais fait plonger dans ma drogue, je lui avais appris à jouer, je lui avais appris à écouter, à peser, à sentir, à ressentir. Je lui avais dit qu'il ne perdrait pas. Il n'avait jamais perdu. C'était peut être dans la tête que ça se passait. Ou bien c'était seulement de la chance, je n'en avais aucune idée, je ne savais pas. Je m'en fichais, je ne voulais pas savoir, je ne voulais pas entendre. Juste tirer. Juste retenir ma respiration, fermer les yeux et  appuyer sur la détente. Entendre avant de comprendre. Comprendre que je n'étais pas mort. Que j'étais encore là et que mon opium nerveux se déversait déjà dans mon être, sentir que l'adrénaline rongeait mon cerveau, me délectait du raté de mon muscle cardiaque qui ne manquait pas d'être au rendez vous. À chaque fois.

Mais le poète avait toujours su allier des décharges d'espoir et de félicité fugaces à ses dépressions chroniques. Et c'était cette ambivalence, cet équilibre ô combien instable entre son ambition narcissique et son désespoir résigné d'être de chair impuissant qui en faisait la beauté. Baudelaire était la dualité de l'homme. Je ne percevais pas d'ambition en Charles, je ne percevais pas de dignité, je ne percevais pas le moindre gramme d'espoir alors qu'il était écroulé en face de moi, larmoyant et pathétique. Je l'avais empoigné à la gorge, je l'avais violenté, j'avais écrasé mon corps contre le sien, faisant tremler ma colonne vertébrâle assaillie de frissons inavouables. J'avais compressé son être, nous infligeant à nouveau une proximité qui m'était autant nécessaire qu'insoutenable. Je ne pouvais pas m'en empêcher, je le désirais plus que je ne voulais bien le reconnaître, mais j'étais incapable de le supporter, je ne pouvais pas faire face ça, c'était trop. Trop fort, trop puissant, trop soudain, trop flou. Trop. J'appuyai mon arme contre sa gorge. Je voulais qu'il souffre. Pour le moment j'arrivais à faire encore un tant soit peu abstraction du fait que ce soit lui, que ce soit son torse que ma main pressai, que seul quelques morceaux de tissu séparaient nos corps. Je me laissais emporter par la colère, par la haine qu'il m'inspirait, par l'agacement que mon incompréhension entraînait. Je le regardais. Je le foudroyais du regard, je le dévorais des yeux alors qu'il me semblait si proche mais également si lointain. J'enfonçais le canon du revolver contre sa peau. Je savais qu'il avait entendu. Bien sûr qu'il avait entendu. Je lui avais appris à écouter, il savait le faire. Je le voyais dans ses yeux également, je savais que lui aussi savais, je voyais qu'il me croyait, parce qu'il l'avait également perçu. Et pourtant il me demandait de tirer et pourtant il disait qu'il s'en fichait. Et le pire c'était ses yeux, ses yeux qu je fixais en vain, ses yeux vides, ses pupilles sans vie qui confirmaient sans relâche ce que ses mots exprimaient. Il n'en avait rien à faire. Pendant quelques secondes je me retrouvai destabilisé. Impuissant face à cet abandon, face à cette fatalité. Et une colère nouvelle m'envahit. Je tirai dans le plafond, nous gratifiant de queqlues éclats de plâtre. Je le haïssais. Il n'avait pas le droit de faire ça. Il n'avait pas le droit de tout rejeter, de ne plus rien vouloi. Non. Il ne pouvait pas. Ce n'était pas juste, c'était trop facile, c'était lâche.

Je le lassais contre le mur, immobile et mort. Je me retournai, m'autorisant ma propre partie. Tirant à mon tour, faisant entrer le canon réchauffé par la première balle en contact avec ma peau. Je connaissais cette arme, c'était au fil des années devenu une extension de mon propre bras. Et je tâchais de ne pas écouter, je ne voulais pas savoir, je ne voulais pas entendre, sinon ça ne servait plus à rien, sinon c'était soit sans intérêt soit suicidaire. Le destin était encore une fois en ma faveur, comme depuis toujours, pour ce qui est de ce jeu là du moins. Je ressentais tout. Je fermais les yeux, savourant la réaction de mon organisme, appréciant l'effet sur mon corps et mon esprit, me délectant d'être encore en vie, bien heureux d'avoir frôlé la mort. Encore une fois.

Je le regardais. Je m'étais assis sur ce qui servait plus ou moins de canapé, en face de lui, toujours appuyé contre le mur, hagard, absent. Je l'observais. Tirant doucement sur ma cigarette, appréciant l'effet salvateur du tabac allié à une décharge suculente de roulette russe. Mon esprit s'apaisant. Un peu alors que je le contemplais. Ce n'était pas Charles en face de moi, ce n'était que son cadavre. Ce n'était pas Baudelaire atteint du spleen, ce n'était qu'un minale dépressif, alcoolique empestant l'éthanol et le tabac froid qui vous balançait son regard vitreux au visage. Ce n'était pas Charles. Charles c'était l'espoir, c'était la vie. C'était l'incarnation du romamtisme. Il n'était pas que suicidaire, il était joueur, il était vif, tout comme Baudelaire. Baudelaire était tellement plus complexe, tellement plus qu'un simple esprit torturé, tellement plus que ce que Charles semblait être devenu.

Je déclinais mon identité entre deux lattes de cigarette, je gardai le regard fixait sur lui, consumant à vitesse grand V l'herbe roulée. Il m'appelait Arik, comme tout le monde. Comme en Russie. Je repensais à l'avant, à mon ancienne vie. Ce surnom Arik. Il me servait de prénom et de nom de famille, une variante à l'appelation de batârd qui semblait si bien m'aller. C'était normal là bas, c'était mon diminutif, le diminutif d'Aristarkh. Quel prénom à chier. Ma mère aurait pu trouver mieux, vu ce qu'il signifie j'ose espérer qu'il s'agissais seulement d'un sarcasme entêté, un cynisme désabusé qui provoqua les sourires amusés qui me poursuivirent toute mon enfance. Il le répétait, encore et encore, cherchant une quelconque signification dans ce nom. Je me consummais, l'entendant murmurer mon nom, tentant de se souvenir de moi, sûrement. Je me sentais fondre, je me sentais défaillir. Un agacement puissant pris le dessus. Il fallait qu'il arrête ce manège. Oui, Arik. C'est le diminutif de mon prénom. C'est comme ça que tu m'appelais, c'est comme ça que tout le monde m'appelais là bas. Là bas. En russie, à la guerre. Autrefois, quand tu étais toi, quand j'étais encore moi. Il répéta son nom, comme s'il l'entendait pour la première fois, et si j'avais bien compris c'était le cas, je venais de le baptiser, je venais de lui offrir une identité, son identité. Un sur trois. Je ne savais pas ce que ça voulait dire. Je m'en fichais, je devinais qu'il se parlait à lui même, que je n'avais pas ma place dans l'esprit ce Charles dans l'immédiat. Je ne pouvais détacher mes yeux de lui, apposant mes lèvres sur le filtre tirant sur ma clope. J'étais en feu, embrasé par sa proximité, détrui par la distance qui le séparait de moi, parce gouffre nouveau qui se creusait. Il ne savait pas qui j'étais. Il ne savait pas qui nous étions. Il devrait le sentir pourtant, cette tension dans la pièce, cette attraction qui faisait que l'air était difficilement respirable, ce brasier qui nous mettait en cendres, lentement, sûrement. Il se concentra, il tentait sans aucun doute de trouver un écho à ce patronyme, de se souvenir, il tentait en vain de rallumer l'étincelles, de redevenir Charles, de comprendre, il attendait ce moment où tout s'éclairerait, où ça deviendrait clair, où il entendrait son nom, il ressentirait qui il est, à ce moment il me verrait, à ce moment il saurait. Mais ce moment ne venait pas. Charles continuait d'arborer son air perplexe, il continuait de chercher. Il ne trouverait pas, il ne me verrait pas. Jamais. Plus jamais. Il grogne, se tient le genoux. C'est un animal blessé, un estropié qui m'annonce la réponse à la seule question qui me brûle les lèvres, à ce comment qui me hante. Le coma. L'amnésie. Ça explique tout. La date est cohérente, mais c'est impossible, c'est trop improbable, combien de chances avait-il que ça arrive ? Si peu, et pourtant. Coma... Le seul mot qui importait au fond, la seule chose qui ai une véritable signification. Dix ans, Quinze, peut importe. Dans tous les cas il avait sombré dans tous les cas il m'avait oublié.

Des sanglots me ramenèrent à la réalité et je regardai Charles interloqué. S'était-il réellement mis à pleurer ? Il faut croire que j'avais réellement perdu ma sensibilité, ou presque parce que j'étais plus scothché que concerné par son désarroi. Sérieusement ? Il en a pas marre de jouer la petite victime. J'avais envie de le secouer, mais en même temps je voulais le prendre dans mes bras, je voulais essayer ses larmes, je voulais effleurer ses lèvres et lui dire que j'étais là. Qu'il ne devait plus pleurer, que tout irait bien. Je m'allumais une nouvelle clope alors que mon interlocuteur était secoué de spasmes et de hoquets. Je l'observais, restant simple spectateur de cette scène incongrue. Il s'excusait. Enfin. Mais en même temps j'en avais rien à faire de ses excuses. Il ne se souvenait plus. Nan, sans déconner ? Je savais, il l'avait déjà dit. Oui, c'est ce qu'il me semblait avoir compris aussi. dis je avec un cynisme grinçant et un sourire un coin totalement inaproprié. Je n'étais plus moi, je ne savais plus ce qui se passait. Il me demandait quoi là ? Il voulait que je lui dégomme la tête. Je sentis la colère m'envahir. Il en avait pas marre de faire de la merde celui là ? Il en avait pas marre de me pousser à bout et de penser qu'à son joli petit cul de français. Tirant une dernière latte je jetai ma cigarette avant de prendre une voix calme, glaciale et puissante. Charles. Shut up. Chalres. Stand. Charles. Look at me. Tu es mort une fois. Tu me demandes sérieusement de te tuer ? Encore une fois ? Pour de bon ? Tu te fous de ma gueule. T'es pathétique Delancastre. Tu me donnes envie de vomir. Je me levai, je m'approchais de lui. T'as pas le droit de faire ça. Faut que tu te ressaisisses mec.

Je vins m'asseoir à côté de lui. Je me laissai choir contre le mur, mon épaule se collant à la sienne. Toute forme créée, même par l'homme, est immortelle. Car la forme est indépendante de la matière, et ce ne sont pas les molécules qui constituent la forme. C'était tout ce qu'il me restait, tout ce qu'il nous restait. Baudelaire.

Charles E. Duval
Charles E. Duval
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Âge : Une petite trentaine il pense.. Mais rien est vraiment sûr.
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MessageSujet: Re: Toute forme créée, même par l'homme, est immortelle. - Chark   Toute forme créée, même par l'homme, est immortelle. - Chark EmptyLun 30 Sep - 16:01


La fidélité est un vice de pauvre.
Charles feat Arik.

 



Charles avait connu les hommes. Il avait entendu des histoires. Il les avait écouté sagement. Il aimait écouté. C’était ce qui alimentait son spleen. Il se délectait de la vie des autres à mesure que lui n’en avait plus. Parfois dans les moments ou il était le plus motivé, il tirait des vies de ses camarades des idées pour la sienne, pour un passé qu’il saurait s’inventer et raconter à qui veut l’entendre. Mais ce n’était jamais bien cohérent... Il n’essayait même pas de rendre sa audible. Il ne voulait jamais vraiment le raconter. C’était son passé qu’il cherchait. Il ne voulait pas de celui d’un autre. Parfois l’alcool lui faisait croire le contraire. Mais au final, il n’en avait que faire. Il se fichait éperdument des histoires que l’on lui racontait. De telle ou telle vie. Mais il écoutait. Toujours. Et il retenait. Parfois. Lorsqu’il n’avait pas trop bu. Sa tête était pleine d’histoire. De gens qu’il avait passé sur son chemin. Il se souvenait presque de chacun de ses adversaires. Ceux qui lui avait prêter leur lit contre une balle dans la tête. Au fond c’était ça. Il se souvenait de tout ceux qui avait été tué pour que lui puisse vivre. Peut être devait-il en avoir honte. D’une certaine manière il était devenu un sérial killer qui tuait pour le gîte et le couvert. Il aurait pu demander aimablement. Il aurait surement trouver des âmes sensibles à son désarrois. Des gens qui auraient voulu protéger un pauvre soldat amnésique surement traumatisé par les horreurs de la guerre. Mais il n’était pas traumatisé. Il ne s’en souvenait juste pas. La preuve qu’il n’en était pas traumatisé. Dès la première occasion il avait filé à nouveau sur le front. A moitié blessé, et l’âme en berne, il avait peut être eu l’idée de mourir la ou il avait commencer son affaire. Il ne savait pas. Mais il avait plus souffert de la fin de la guerre que de sa présence au front. Au fond il savait que sur le front demeurait sa place. Enfin... Peut être qu’il aurait pu la jouer réglo depuis le début. Peut être n’aurait-il jamais eu vraiment besoin de jouer ce rôle de slave frapadingue accroc à la roulette russe. D’ailleurs il ne savait pas d’ou ça pouvait bien venir... La Roulette Russe... Le front Russe surement... Il n’avait pas d’autre idée... C’était tout de même stupide... Au fond des tranchés de risquer de se faire encore une fois sauter la cervelle, alors qu’on s’enterrait vivant pour éviter que l’ennemi ne nous la fasse sauter avant... Peut être préférait-on prendre le risque de mourir de notre propre main que de celle des ennemis... Des Boches... Peut être. Il ne savait pas. Il ne se souvenait plus. C’était partit avec le reste. Il ne restait plus que la roulette russe. Et cette fâcheuse habitude de vouloir se faire sauter la cervelle. Il aimait ça. Entendre ou ne pas entendre. Enfin Entendre ou ne pas écouter. Il écoutait pour l’autre. Se pinçait la lèvre anxieusement à chaque fois qu’il entendait le bon déclic. Enfin le mauvais en l'occurrence. Celui qui scellerait la tombe de son adversaire. Par ce pincement de lèvre distinct l’autre croyait que Charles s’inquiétait réellement pour lui. Ca le rassurait dans le fond. Savoir qu’il risquait de mourir avec quelqu’un qui s’inquiétait pour lui... Enfin il n’en savait rien... Il supposait... Et comme les gars n’étaient jamais là pour lui dire après coup le fond de leur penser, il ne saurait jamais. Il aurait été un mauvais joueur de poker... Il ne savait pas bluffer. Mais pour la roulette russe il n’y avait pas besoin de savoir bluffer. L’homme tirait toujours. Peut importe la tête que Charles faisait. L’homme se faisait toujours sauté la cervelle. Et l’homme n’était jamais plus là pour aller raconter à ses copains que lorsque Charles se pince la lèvre ce n’est pas qu’il s’inquiète, c’est qu’il s’empêche de rire parce qu’il sait que vous allez y passer. Ou alors c’est parce qu’il a peur que vous ayez entendu... Et que dans un élan tragique et stupide d’attachement à la vie vous retourniez l’arme chargé contre lui et que vous tiriez... Mais il était plus probable que ça ne soit à cause du rire. Le rire qui lui indiquait qu’il avait raison lorsqu’il s’était vanté qu’il ne mourrait jamais à ce jeu.

Enfin Charles avait connu des hommes. Il avait écouté des histoires. Et il en était venu à croire que tout le monde était obsédé par quelques choses. Que notre cerveau dissimulait une montagne de chose, et se noyait généralement dans ses souvenirs plus pénible. Il avait vu d’ancien soldat se réveiller au milieu de la nuit en hurlant à la mort pour une quelconque raison. Il en avait vu d’autre, estropier qui hurlait de douleur ressentant encore l’explosion de l’obus à l’intérieur de la jambe qu’il n’avait plus. Il en avait vu encore d’autre s’arrêter au milieu de leur journée, de leur conversation, soudainement happé par un souvenir traumatisant. Oui il en avait vu des gens. Et tous avait une terreur qui se dissimulait dans leurs yeux, quelque chose qui leur détruisait l’esprit lentement et qui les retirait du monde pendant quelques minutes. Secondes tout au moins. Et pendant un moment Charles les avait envier. Bien sûr lui aussi avait ses démons. Il ne pouvait plus s’endormir sans avoir l’impression de mourir asphyxier... Mais ce n’était pas un souvenir. Ce n’était pas une absence malheureuse. Il ne pleurait pas sur la mémoire de ses compagnons morts... Il ne savait même plus s’il avait eut des compagnons dans l’armée. Il ne savait même plus quel était son rang... Avait-il eu des gens sous ses ordres, ou était-il au plus bas de la chaine alimentaire ? Il s’asphyxiait bêtement d’un gaz qu’il ne sentait plus, et qu’il ne se rappelait pas vraiment avoir sentit un jour. Ce gaz semblait être la seule chose dont il pouvait se souvenir. La chose qui semblait lui avoir dérober tous les autres. Et alors qu’il se réveillait en sueur, constatant qu’il respirait normalement, il rêvait d’un traumatisme plus charmant. Il rêvait d’une amante laissé à la guerre, d’une fille qui pleurait sur son absence. Il rêvait de parent pleurant leur fils jamais revenu. Il rêvait d’ami mort au combat qu’il ne saurait revoir. Il rêvait d’un traumatisme un peu plus plaisant, un peu plus sociable. Il rêvait d’absence mérité au milieu d’une discussion. Une absence causé par un mot, un rire, un je ne sais quoi qui lui rappellerait subitement quelques choses importants que son esprit avait occulté. Mais l’absence n’était jamais venu. Et Charles avait continué d’écouter les histoires. De remarquer combien l’homme était une espèce hantée. Et combien lui manquait cruellement de fantôme. Etait-ce indécent de vouloir des chaînes qui le rattache à son passé ?

Mais ce n’était plus la question. Il était là son passé. Devant lui. Son passé était beau. Son passé était aussi perdu que lui. Peut être un peu plus. Parce que son passé ne l’attendait pas. Son passé ne l’attendait plus. Peut être son passé ne l’avait-il pas attendu... Ou peut être s’était-il juste lassé de l’attendre. En même temps, au mieux cela faisait sept ans qu’il ne s’était pas pointé face à se passer. Lui aussi en sept ans il en aurait eu marre d’attendre. C’était normal. Il ne pouvait pas lui en vouloir. Quoiqu’il en soit ce passé n’espérait pas le revoir de sitôt. Ou plutôt il avait justement espéré le revoir plutôt. Mais plutôt n’était jamais venu. Et Charles n’était jamais réapparu. Même aujourd’hui on ne pouvait pas dire qu’il était là. Pouvait-on dire qu’un homme sans mémoire, sans aucun souvenir était encore un homme ? Surement que oui... Sinon qu’était-il ? Mais était-il encore Charles pour autant. Charles agissait-il comme lui ? Charles était-il aussi perdu et morose que lui ? Charles était-il aussi noir et savait-il aussi bien éteindre sa conscience pour s’endormir le soir ? Charles était-il aussi pitoyable ? A voir son passé en face de lui il en doutait sincèrement. Mais que pouvait-il faire ? Son passé ne parlait pas. S’il n’était pas muet, il semblait être animé de multiple absence que Charles aurait rêvé d’entendre. De toutes les histoires qu’il avait entendu, c’était celle-ci qu’il voulait entendre. Celle-ci qu’il avait besoin de connaître. Les autres histoires il s’en fichait pas mal, mais celle de l’homme en face de lui semblait importante. Peut être parce qu’elle le concernait lui. Que ces absences étaient les absences qu’il voulait justement avoir. Mais son passé était devant lui, toujours aussi muet, et perdu. Et il ne semblait pas décidé à parler. A lui expliquer.

Un instant Charles avait été asphyxier par la présente trop pressante de ce passé sur son corps. L’homme l’écrasait de ses muscles saillant et lui déchargeait une certaine haine à la figure. Il n’était pas sûr de ce qu’il avait fait de mal. Ca pouvait être un milliard de chose. Il aurait pu tuer la femme qu’il aimait... Non... ll n’avait jamais joué à la roulette russe avec une femme... Il n’aurait pas osé. Non vraiment, il ne savait pas. De toute façon il ne savait rien. pas même le nom de l’homme qui lui faisait face. Peut être était-ce simplement ça qui énervait l’autre. Lui aussi ça l’agaçait. Ca l’insupportait même. Il se tirait régulièrement des balles dans le crâne pour soulager cette rage contre lui même. Bien sûr les balles étaient à blanc... Comme toujours. Sinon il ne serait plus là pour recommencer. Mais le fait-est qu’il risquait toujours de se faire plomber la cervelle pour se punir de cette cervelle inutile qui n’avait rien retenu. Alors l’homme pouvait y aller. L’homme pouvait tirer. L’homme avait écouté. L’homme ne faisait pas cette moue anxieuse que Charles faisait à chaque fois qu’il avait entendu. Mais l’homme avait pourtant bien entendu. Et l’homme avait vu que Charles aussi. Il avait vu qu’il s’en fichait. Qu’il pouvait tirer. Qu’il ne réagirait pas. Il ne fermerait même pas les yeux. Peut être avait-il agit comme ça comme une tactique de dissuasion. Ou peut être n’en avait-il réellement rien à foutre. Avec Charles c’était toujours difficile de savoir. Il était l’un de ses suicidaires trop complexe pour savoir exactement comment il allait réagir. Quelque part s’il voulait mourir, il serait déjà mort. Mais il mettait une passion si malsaine dans l’amusement à jouer avec la mort que parfois on se demandait. Quand ses adversaires suaient à grosse goutte sur le canon froid de l’arme qu’ils braquaient eux même sur eux, Charles restait impassible. Lorsque lui même s’enfonçait le canon sous le menton, ou dans la gorge, il ne bronchait pas. Il gardait son visage fermé, ou tout sourire était absent, et il fixait l’homme en face. Il fixait l’homme de ses yeux terriblement bleu. Terriblement bleu, froid et vide. Ses yeux aussi beau qu’effrayant. On avait vu un regard aussi hermétique. Rien ne se lisait dedans. Il n’y avait rien. Jamais rien. Juste votre pauvre reflet. Charles n’était rien. Rien d’autre qu’un miroir, une sorte de métamorphe qui vous renvoyait votre image à défaut d’en avoir une propre. Mais au fond de lui Charles savait. Il savait que son attitude déstabilisait... Il n’avait pas eu tant de fois affaire à ce genre de personne, mais quelque part il savait, ou du moins il se doutait fortement, qu’à moins d’être venu avec l’intention de le tuer, il était difficile de tuer quelqu’un qui semblait n’en avoir rien à foutre, et qui vous dévisageait sans trembler alors que vous cherchiez à le descendre. Il fallait avoir des couilles pour oser descendre quelqu’un qui vous scrute jusqu’au plus profond de votre âme, sans trembler d’aucune peur.

Mais Charles avait beau scruter l’âme de l’homme, il ne comprenait pas. Il ne trouvait pas les réponses à ses questions. Quelque part l’homme était aussi imperméable que lui... Et c’était désagréable. Le plâtre s’effondra sur sa tête. Quelque part il avait su. Il ne mourrait jamais... C’était comme ça. C’était une donnée insupportable qui lui brûlait l’esprit. Quelque part il était sûr que si un jour il cherchait à se suicider, mettant pour la première fois toutes les balles dans son barillet, l’arme s'enrayerait... ou un truc stupide du genre. La mort ne devait pas vouloir d’homme aussi pitoyable. Charles n’était pas drôle comme vivant... Il imaginait que comme mort, il devait être chiant à mourir... Il n’amuserait même pas le diable. Peut être est-ce pour ça qu’il était toujours vivant... On attendait qu’il est retrouvé un temps soit peu sa joie de vivre et son humour avant de le descendre... L’homme joua. Survécu. Charles sourit faiblement. C’était fou. Ils étaient similaire quelques part. Un immortel. Enfin en quelques sortes...

Mais l’adrénaline déchargé dans le cerveau de Charles successivement par son tire et par celui de l’homme avait finit par glisser, avalée subitement par sa gueule de bois encore trop alcoolisé. Il savait bien qu’il buvait trop. Beaucoup trop... Mais hier soir il avait abusé. Qui ressentait encore les effets de l’alcool à quinze heures de l’après midi et des brouettes ? Son corps ressentait un vague sentiment d’ébriété plus triste que joyeuse, mêlé à l’insupportable sentiment de la gueule de bois qui traîne votre cerveau dans la boue, sous les obus, dans l’horreur. L’homme avait reculé. Agacé. Apaisé par son tire. Lui bénéficiait de l’adrénaline. Encore. Charles retirerait bien un coup... Pour pouvoir se sentir moins mal... Quelques minutes.. Mais à trop jouer on finit par ne plus rien ressentir... Et tout au pire... Ou au mieux, on finit par réellement se foutre une balle dans le crâne. Il ne fallait pas trop jouer avec sa chance. Charles avait beau se foutre littéralement de la chance qui l’animait, il n’avait plus envie de jouer. Son corps lascif voulait s’endormir contre le mur. Son cerveau brulé voulait tout savoir des absences de l’homme, du fantôme qu’il lisait dans ses yeux. Il voulait tout savoir du Charles qui connaissait et ne reconnaissait plus.

Aristarkh. Même pour lui qui parlait le russe à merveille c’était difficile à prononcé. Cela dit un nom pareil il était honteux de ne pas s’en souvenir. C’était le genre de nom qui vous restait graver dans le cerveau. Le genre de nom que l’on adorait ou que l’on détestait, mais que l’on ne pouvait pas oublier... Tout comme la personne qui semblait aller avec d’ailleurs. Il n’avait pas l’air d’être de ceux qu’on oublie... Et pourtant... Charles défiait toutes les lois ces derniers temps... Celle de la mort, celle de la vie... Il était un monstre bloqué entre les deux, pas tout à fait vivant, mais clairement pas mort pour autant... Peut être aussi pour ça qu’il ne pouvait pas mourir. Il cherchait à trouver un échos dans ce prénom. Il le répéta, plusieurs fois, en vain. Le crachant dans un murmure. Laissant son corps se faire envahir d’une chaleur aussi agréable que désagréable. Agréable parce qu’elle se lovait dans son ventre à juste titre, comme si c’était parfaitement normal. Désagréable parce qu’il ne savait pas d’ou ça venait, ce que s’était, qu’il ne comprenait pas. Charles n’aimait pas ne pas comprendre. « Oui, Arik. C’est le diminutif de mon prénom. C’est comme ça que tu m’appelais, c’est comme ça que tout le monde m’appelais là bas.» La voix agressif de son passé vint le frappé en plein visage. Il releva les yeux brutalement vers l’homme qu’il fixa à nouveau. Il avait eu raison de le reprendre. C’était stupide ce qu’il faisait. Tout le monde... Il n’était donc pas spécial... Il était comme tout le monde. Comme tout le monde. Si ça se trouve l’homme n’avait pas tant de chose à lui dire sur lui même... C’était juste un leur... Mais pourquoi s’énervait-il dans ce cas là ? «Je suis désolé... J’y arrive pas...» Il n’y arrivait pas. Il n’y avait rien de plus vrai. Il ne se souvenait pas. Si ça se trouve il ne se souviendrait jamais. Un éclair de terreur traversa ses yeux. «Aristarkh...» prononça-t-il étrangement sans trop de difficulté. «J’aime bien... J’aimais bien Arik... N’est-ce pas ?» C’était stupide. il parlait d’un prénom. De sa consonance.... Et du faite qu’il est pu aimer le prononcer... Ca n’avait pas de sens. Qu’est ce que ça changeait s’il aimait prononcer ou non ce prénom ? C’était d’un ridicule... Il s’arrêta ensuite sur la propre identité. Toute aussi vide de sens que celle de l’homme... A la différence qu’il était sûr d’avoir déjà entendu le nom Delancastre... Il ne savait plus d’ou, mais il en était convaincu. Ce nom ne résonnait pas à ses oreilles comme un simple nom que l’on aime bien, mais comme quelque chose qu’il connaissait. Incapable de mettre la main dessus il s’effondra. Il n’entendit même pas l’absence que l’homme eu sur ce qui l’avait rendu amnésique. Le coma. Oui... heureusement qu’il n’avait pas entendu... Charles l’aurait frappé. Le coma. Oui le coma. Cet espèce d’état léthargique dans lequel il semblait toujours être puisque la mémoire ne lui revenait pas.

Il se mit à pleurer. Assassiné par sa conscience défaillante il s’effondra. S’il pouvait avoir la conscience de ce qu’il était il se taperait la tête contre les murs. Il n’était pas un pleureur... Il valait mieux que ça. «Oui c’est ce qu’il me semblait avoir compris aussi...» dit-l’homme, grinçant... Si Charles n’était pas aussi désespéré, il aurait riposté.. Mais il était vide. Et à cet instant présent, il se fichait de tout. Il n’avait qu’une idée en tête. Cette fois-ci il semblait sûr. Il ne voulait pas continuer. La mémoire ne lui reviendrait pas, et il ne voulait pas vivre sans être lui. Il se fichait d’Edgar. Il voulait Charles. Et Charles était mort. Ce n’était pas grave, il acceptait. Mais il ne voulait pas vivre de la sorte. «Charles. Shut up. Charles. Stand. Charles. Look at me. Tu es mort une fois. Tu me demandes sérieusement de te tuer ? Encore une fois ? Pour de bon ? Tu te fous de ma gueule. T'es pathétique Delancastre. Tu me donnes envie de vomir.» Charles encaissa durement. Pathétique. Il méritait surement ses adjectifs. Mais il ne comprenait pas pourquoi l’homme s’énervait autant. Il était comme tout le monde bordel. Comme tout le monde, en plus vide et plus inutile. «C’est quoi ton problème. Arik ! ?» dit-il rageusement en appuyant sur ce surnom qu’il venait d’apprendre. «Tu n’as pas finit de m’emmerder ? Je fais ce que je veux non ? Je suis pathétique si j’en ai envie. Et j’en ai rien à foutre de ce Charles que je ne connais pas et que je ne connaîtrais jamais. Et Edgar en à marre d’être un putain de néant ! Et je ne vois pas le problème. C’est pas comme si tu m’avais dégommé la gueule une première fois ! Tu n’as pas l’air d’être un enfant de coeur ! Tu n’as qu’à faire un effort !» Il était con. Il ne comprenait rien. «T'as pas le droit de faire ça. Faut que tu te ressaisisses mec.» Il n’avait pas le droit ? Sérieusement ? mais c’était ça vie tout de même. Il avait tous les droits s’il fallait. «Pas le droit ? Et tu es qui pour m’interdire ce droit là ? Tu joue au moins pathétique de nous deux mais tu ne me dis rien. Tu le sais toi qui je suis ! Qui tu es pour moi ! Dis moi au lieu de m’interdire quoique ce soit !» Il voulait se menacer encore une fois... Mais l’homme devait avoir compris le principe. Enfin peut être... De toute façon il en avait marre de se faire des menaces de mort... Ce n’était plus particulièrement amusant...

Dans sa colère il ne vit pas l’homme s’assoir, il sentit juste l’épaule se cogner à le sienne. Sa respiration se coupa quelques secondes, et il observa. Il écouta. «Toute forme créée, même par l'homme, est immortelle. Car la forme est indépendante de la matière, et ce ne sont pas les molécules qui constituent la forme.» Baudelaire. Il se retourna stupidement, cherchant le regard de l’homme, la bouche légèrement entre-ouverte. Baudelaire. Il venait de citer Baudelaire. De mémoire. Comme lui. Combien de chance ? Ses yeux dérivait sur les traits avantageux de l’homme, et son coeur ému par la pression du poète gonfla dans sa poitrine à lui en faire mal. «L’âme d’un vieux poète erre dans la gouttière avec la triste voix d’un fantôme frileux.» répondit-il la voix écrasée par l'incompréhension. Comment l’homme pouvait-il connaître Baudelaire. Aussi bien ? Cela dit il parlait un bon Français aussi... Aussi bien que lui parlait Russe. Il avait répondu selon son spleen, c’était la seule chose qui semblait lui convenir.
Aristarkh N. Leonidov
Aristarkh N. Leonidov
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Occupation : Ancien membre de la mafia. Gérant d'un restaurant où je t'assure que tu ne veux pas aller et du bar clandestin dans son sous sol où tu rêves de pouvoir poser ton derrière fortuné.
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MessageSujet: Re: Toute forme créée, même par l'homme, est immortelle. - Chark   Toute forme créée, même par l'homme, est immortelle. - Chark EmptyMar 22 Oct - 9:53


La fidélité est un vice de pauvre.
Charles feat Arik.

 



Faux espoirs. Espérance déchue. Je le regarde, je le toise, je l'observe. Interdit. Perdu. Un instant mon œil a brillé, un instant j'ai cru que le moment était arrivé et puis plus rien, extinction des feus. Plus de lumière, ma pupille s'est ternie devant la vérité. La vérité n'a rien d'intéressant, c'est pour ça qu'on lui préfère la fiction, qu'on lui préfère les mots, les mots ne sont pas réels, les mots sont sublimes, Baudelaire ne raconte pas la vérité, Baudelaire inscrit sur le papier la beauté. On se réfugie dans notre tête, dans nos souvenirs, dans ce qu'on a sauvegardé, de ce qu'on espère et ce qu'on rêve, parce que c'est mieux, parce que c'est subjectif parce que ce n'est pas la vérité, la vérité absolue est fade et vaine. Qu'est ce que la vérité sans subjectivité ? Je ne me souvenais pas de la vérité, je me souvenais de Charles, je me souvenais de sa peau, de ses lèvres, de ses mots, de tout ce que mes sens avaient pu capter. Délicieusement subjectif. Je ne voyais pas l'homme je voyais, ce que j'avais aimé chez lui, ce qui m'avait fait goûter à l'interdit, à ce que je n'avais jamais envisagé. Pourtant c'était Charles qui me faisait face. Le problème c'était la réalité qui l'accompagnait, main dans la main avec la dure vérité. Toutes les pages de son histoire brûlée, laissées au feu. Notre histoire. Ce n'était plus rien. Plus rien pour lui. Deux ans envolés en fumée. Mais moi je les revoyais encore. Ces deux années faisaient encore partie intégrante de ma vérité. Enfin je crois.

Il m'avait oublié. Il les avait tous oubliés. Oui mais nous. Nous on comptait plus non ? Nous on était indélébiles ? C'est ce que je croyais, ce dont je m'étais persuadé. Mais manifestement on avait pas été assez marquant, pas assez important puisque maintenant il n'y avait plus de nous. Il n'y avait plus que lui, moi. Semi inconnus.

Je le connaissais par cœur, comme un morceau de moi, comme un éclat de mon être, mais il n'était plus pareil. Je ne reconnaissais pas. Parfois si. Parfois non. C'était déconcertant, je ne savais plus quoi penser, quoi dire, quoi faire. L'espace d'un instant je le voyais, superbe, me faisant face, je le retrouvais, c'était lui, à nouveau, on me l'avait rendu. La seconde d'après je me perdais dans son regard vide. Vide de sens, d'histoire, d'émotions. Son regard vitreux qui me donnait envie de dégobiller. Pourquoi il revenait vers moi, même s'il ne savait même plus qui j'étais. Mon frère. Mon âme. Dévoré par un mal plus grand que lui. Réinitialisé par une puissance qui nous échappait. Si j'avais douté je savais maintenant qu'il était bien là, que c'était bien lui. Ça ne faisait plus aucun doute alors que son corps s'abattait contre le mien, alors que sa main s'enfonçait dans ma cage thoracique, alors que son haleine caressait ma peau, alors que ses yeux cherchaient les miens, alors qu'ils s'animaient, mais seulement de colère.

C'était une danse, un ballet irréel, à travers le temps, à travers l'espace. Il se détachait de moi, nous nous observions, muets, interrogateurs. Charles était-il toujours lui même ? Avait-il seulement changé ? Tout le monde change, j'avais changé, beaucoup. Peut être ne se souvenait-il pas plus de moi que je ne le reconnaissais pour cette raison. Parce que je n'étais plus Arik. Je n'étais plus un gamin sensible, je me dominai désormais, je n'étais plus bohème, je n'étais plus doux, je n'étais plus avenant, je n'étais plus perdu, je n'étais plus un artiste incompris. J'étais devenu un homme, sans la présence de Charles, sans le concours de mon amour j'avais grandi.

Sept ans. Je le croyais mort. Vraiment. Sinon il serait revenu, sinon il m'aurait retrouvé. N'était ce pas ce qu'il faisait aujourd'hui ? Non. C'était moi qui été revenu à lui. Sept ans. Il s'attendait à quoi ? À ce que je lui saute dans les bras ? À ce que je sois l'homme le plus comblé du monde ? À ce que je lui raconte tout ce que j'avais fait pendant ce temps ? À ce que je pardonne son absence ? À rien. Manifestement. Son regard le disait, il ne s'attendait à rien. Il n'attendait plus rien de moi, plus rien de la vie. N'est ce pas une honte d'être déjà aussi désabusé par la vie à son âge ? J'aurais aimé le serrer contre moi, lui dire que tout irait bien, qu'on était à nouveau ensemble, que plus rien ne nous séparerait. J'aurais aimé lui raconter tout ce que j'avais fait. Ce dont j'étais fier, ce à quoi je préférais ne pas penser. Mais il aurait fallut que ce soit Charles pour ça. Or ce n'était pas lui. Charles était mort. Cet homme était un imposteur.

C'était possible après tout, on croise parfois des gens qui semble être la copie conforme d'autres personnes. C'était peut être son sosie, ou bien Charles avait peut être un frère, ce n'était pas invraisemblable, je ne connaissais pas réellement sa vie, pas sa vie en France. S'il avait un jumeau il me l'aurait dit pourtant. C'était son sosie, ça devait être ça. C'est pour ça que ce n'était pas exactement lui, parce que ce n'était pas Charles. Tout s'expliquait. Je riais seul, d'un rire nerveux, ce n'était rien, ce n'était personne. Faux espoirs. Il ne me reconnaît pas parce qu'il ne me connaît pas.

Qu'est ce qu'il m'agace. Presqu'autant que Charles. Il croit faire son malin avec son revolver ? Il croit que je ne le connais pas ce coup là ? Il croit que je n'ai jamais vu ça peut être ? Charles saurait que c'est vain, ce gamin n'en sait rien parce que ce n'est pas Charles, ou peut être que si, je ne sais pas, je ne sais plus. Je perds patience. Le ballet reprend, à nouveau nos corps se heurtent, à nouveau je nous inflige ce contact malsain et presque libérateur. Le canon sous la gorge je crache ma haine, je libère la rage qu'il m'inspire. Mon esprit proteste contre lui, contre ce jeu, contre tout ce qui me saisit en cet instant. Je ne dois pas regarder ses lèvres, je ne doit pas me laisser perdre dans ses yeux. Son regard à la con. Son air de je m'en foutiste, son arrogance de crevard. C'est ça qu'il veut ? Un aller simple pour les cieux ? Il a entendu il le sait et pourtant il le désire. Il est fou. Il est loin. J'enfonce le canon dans sa gorge, je soumet sa peau, j'entrave sa respiration. Je le toise. Mon avant bras appuyé sur son torse, je sens sa poitrine se soulever au rythme d'une respiration trop calme pour la circonstance, alourdie par mon poids et l'alcool qui infecte son système. Je tire. Des éclats de plâtre nous tombent dessus. La figure est finie à nouveau nous nous éloignons.

Je fume. Pour me détendre, pour l'oublier, pour être autre part, parce que me tirer une balle dans la tête c'est bien beau mais l'adrénaline ne sera pas éternelle. Je me laisse aller, quelques secondes je savoure le mélange d'adrénaline et de nicotine dans mon cerveau, se rependant dans chaque parcelle de mon corps. Il m'agace. Pourquoi ressemble-t-il tellement à Charles ? Pourquoi est ce que j'ai l'impression que c'est lui, que ça ne peut être personne d'autre ? Qu'aucun autre homme ne tiendrait un tel établissement, aucun autre ne tiendrait si peu à sa vie, aucun autre ne me dévisagerai comme ça avec ces yeux trop bleus, avec ce visage trop beau. La distance est rétablie entre nous, avec elle la communication, le dialogue, ou ce qui s'en approche. Je lui donne mon nom, qu'il en fasse ce que bon lui semblera. Mais pas ça. Qu'il arrête de scander ce surnom oublié, qu'il cesse de murmurer ce patronyme que plus personne ne me donne. Tout le monde m'appelait comme ça, ce n'était pas nouveau, mais dans la bouche de Charles je ne pouvais pas, pas comme ça, pas maintenant. «Je suis désolé... J’y arrive pas...» Je vois ça. J'ai guetté pendant quelques secondes, je me suis dit que peut être mon nom ramènerait les souvenirs, peut être qu'il se souviendrait, peut être que d'un coup il me verrait, vraiment, que ses yeux s'illumineraient mais non. Il ne savait plus, il ne me voyait pas. Je sais... C'est tout ce que je trouvais à dire. C'était assez faible, c'était comme ça. Je n'y pouvais rien que voulait-il de plus. Il prononça mon prénom, trop facilement pour ne jamais avoir été en Russie, et le Russe il le parlait bien. Qui était-il alors si ce n'est Charles ? Son sosie pouvait-il également être Russe ? «J’aime bien... J’aimais bien Arik... N’est-ce pas ?» J'avalai difficilement ma salive. C'était quoi ce genre de question merdique ? Il voulait que je décède dans l'instant ? Il voulait que j'arrête de respirer ? Les mots restent coincés dans ma gorge je m'étrangle, lentement, doucement. Je... Oui... Oui, tu aimais bien Arik. La réponse sort plus ferme et sans appel que je ne le voulais, je parle d'Arik comme si ce n'était pas moi, ce n'est plus moi. Je ne suis pas mégalo, je ne parle pas de moi à la troisième personne mais je n'ai pas le choix, si je ne veux pas me perdre dans le passé il faut que j'arrive à maintenir le barrage, à conserver la distance. Je ne sais pas si c'était sensé me consoler mais sa propre identité semble tout aussi étrangère que la mienne à l'homme en face de moi. Il la répétait elle aussi. Nouveau né en quête de sens. Elle non plus ne revenait pas. Il était trop loin, dans un monde parallèle peut être. Lavage de cerveau post mortem. Coma. Tout était là. Un mot. Quatre lettres. Sept ans.

C'était Charles c'était bien lui, mais il m'avait oublié, pour de vrai. Il ne savait plus, ne se souvenait plus. Il n'était pas mort, seule sa mémoire l'était. C'était peut être pire. Il ne se souviendrait jamais de moi. Je n'étais et ne serais plus rien. L'effroi passa l'espace d'un quart de seconde dans mes yeux. Si pour lui je n'étais pour rien alors qu'est ce que j'étais moi ? Juste un homme, comme les autres, rien de plus, je n'étais pas spécial. J'étais un oublié. Moi aussi je voulais l'oublier alors qu'on soit sur le même pieds d'égalité, pourquoi c'était lui ? Pourquoi pas moi ? Oublier qui j'étais. Oublier le bâtard. Oublier tout ce que j'ai fait.

Le dégoût remonte dans ma gorge alors que je contemple Charles. Larmoyant faible. Une vraie lavette. Il cherche quoi ? Un bon coup de pieds au derrière ? Parce qu'en cet instant c'est tout ce dont j'ai envie de le gratifier. Il faut le bouger, le heurter, qu'il respire, qu'il voit, qu'il réfléchisse un peu. Je méprise cette chose qui n'a plus rien de celui que j'ai cru mort. Il fallait que quelqu'un le fasse réagir. J'étais seul avec lui dans cette pièce, alors soit, ce serait moi. «C’est quoi ton problème. Arik ! ?» Mon problème ? Il voulait vraiment savoir ce que c'était mon problème ? Parce que ça pouvait être assez long. Il serait pas déçu. «Tu n’as pas finit de m’emmerder ? Je fais ce que je veux non ? Je suis pathétique si j’en ai envie. Et j’en ai rien à foutre de ce Charles que je ne connais pas et que je ne connaîtrais jamais. Et Edgar en à marre d’être un putain de néant ! Et je ne vois pas le problème. C’est pas comme si tu m’avais dégommé la gueule une première fois ! Tu n’as pas l’air d’être un enfant de coeur ! Tu n’as qu’à faire un effort !» Olivia. Elle s'impose à mon esprit. J'ai envie de vomir. Je retiens un haut le cœur. Mon problème Charles ? C'est toi de toute évidence. Pathétique ça tu l'es mais Charles vaut tellement mieux que ça, tellement mieux que toi. Je suis peut être pas un enfant de cœur certes. Oui je pourrais te buter. Oui je pourrais te foutre une putain de balle entre les deux yeux sans même regarder. Je me détourne l'espace d'une demi seconde alors que le corps gisant d'Olivia miroite à nouveau devant mes yeux. J'avale ma salive. Je reprends, plantant mes yeux dans les siens, le ton froid, l'air arrogant. Mais c'est pas à propos de moi tout ça. C'est beaucoup trop facile. Elle est passée où ta paire de couille Delancastre? Non il avait pas le droit. Il avait pas le droit de me gueuler dessus comme ça, il avait pas le droit de me balancer sa faiblesse à la figure. Qui je suis ? Qui il était ? Comment j'étais sensé lui expliquer ce genre de chose. J'en savais rien, je savais plus, on était pas des mots, on était pas une notion rationnelle. J'en pouvais plus de l'entendre parler. Il voulait savoir ? Il allait savoir.

D'un long pas souple je réduisis à néant la distance entre nous. Impulsivité irrépressible. Ma main droite derrière sa nuque, l'autre échouant sur son torse. Je n'eus que le temps de sentir l'incrédulité dans ses yeux alors que je scellai nos lèvres, embrassant sa bouche. C'était Charles, je le sentais à présent. Je le savais. Je rompis le contact, le souffle légèrement court, fiévreux. Je ne suis plus rien Charles. Non. Je n'étais plus rien. Nous n'étions plus rien, il n'y avait plus de nous.

Assis contre le mur, pathétique. Perdu. Il faut qu'il parle. Qu'il dise quelque chose, qu'il sorte de son silence. Je me laisse tomber à côté de lui. Je n'ai rien à ajouter. Seulement Baudelaire. Seulement lui. Parce que c'est tout ce qu'il reste entre nous, c'est la seule chose qu'il n'a pas oublié. Parce qu'il est immortel, comme moi, parce que nous sommes immortels. Je m'amuse de sa surprise, un sourire arrogant à demi effacé. Je me suis livré. Ça faisait sept ans et il avait fallut que je cède, tellement rapidement. Tellement facilement. Comment pouvait-il avoir toujours un tel pouvoir sur moi après sept ans. Je ne savais même pas si je l'aimais encore, je ne savais même pas si je l'avais jamais aimé. C'était un temps différent. C'était autre part. C'était évident. C'était comme ça. Et maintenant ? T'as du bourbon?

Charles E. Duval
Charles E. Duval
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Âge : Une petite trentaine il pense.. Mais rien est vraiment sûr.
Statut : Il est persuadé qu'il a été marié, mais personne n'est venu le réclamer, il se considère donc comme célibataire, d'autant plus qu'il se souvient pas de sa femme.
Occupation : Gère une maison close glauque - ouvreur au théâtre
Gramophone : Je bois et puis je danse - Aline
Doubles-comptes : blonde hyperactive et violente pour vous servir.
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MessageSujet: Re: Toute forme créée, même par l'homme, est immortelle. - Chark   Toute forme créée, même par l'homme, est immortelle. - Chark EmptyMar 22 Oct - 18:30


La fidélité est un vice de pauvre.
Charles feat Arik.

 



Désespoir. Abandon. Néant. En sept ans Charles avait vécu avec une seule certitude, un seul espoir. Qu’il s’appelait Charles et que c’était la clé à sa mémoire perdue. Il était persuadé au fond de lui, au fond de son âme déchirée pessimiste et pourrie, qu’au moment même ou il entendrait son nom, tout lui reviendrait. Que tout jaillirait dans sa tête et qu’il ne pourrait plus rien ignorer. Qu’il serait à nouveau lui. Il en avait été sûr, qu’un jour tout lui reviendrait. Il pensait que ce patronyme oublié serait la clé de sa mémoire. Une vieille clé rouillée, oubliée, mais qui le sauverait de tout. Pendant sept ans il s’était senti lourd. Lourd et abandonné. Rempli d’un milliard de souvenir sur lesquels il ne pouvait pas mettre la main. En Russie on lui avait dit que tout devait être là, qu’il était arrivé à l’hôpital avec aucun coup sur la tête, que sinon son asphyxie et son coma rien expliquait une aussi grande perte de mémoire. On avait jamais touché à son cerveau. Jamais. C’était un mot qui était resté gravé dans son esprit. Comme un espoir. On avait jamais touché à son cerveau. Tout se devait d’être encore là, quelque part. Comme une menace. Tu ne retrouveras jamais ta mémoire. Jamais. Il était un orphelin qui aspirait à retrouver ses parents, sa famille. D’une manière ou d’une autre. Il s’était découvert homme marié qui aspirerait peut être un jour à retrouver sa femme. Peut être, un jour ou l’autre. Il était un désespéré qui aspirait à retrouver l’espoir. Un suicidaire qui aspirait à retrouver sa vie. Un mort qui était revenu à la vie, et qui risquait de la reperdre trop souvent pour s’assurer qu’il était toujours bien vivant. En sept ans Charles avait vécu comme si rien ne comptait, persuadé qu’un jour sa vie lui reviendrait. Qu’un matin il se réveillerait souriant et qu’il pourrait vivre. Il s’était dit qu’un matin tout serait devenu clair. Que quelqu’un aurait inséré la clé dans la porte et qu’il saurait ce qu’il aurait à faire, qu’il saurait comment agir, comment parler. Il n’avait vécu que pour se faire murmurer son prénom, celui qu’il ne possédait plus.

Et maintenant ? Désespoir. Abandon. Néant. Que lui restait-il ? Un vieux prénom qu’il savait de source sur être une fraude, des faux papiers dans sa poche droite qui retraçait la vie d’un homme inexistant. Un ancien prénom aussi vide de sens que tout autours de lui. Il ne trouvait rien. Cela ne lui rappelait rien. Une identité décédé dans l’esprit de dizaine de personne. Si ça ce trouve il était même marqué sur les monuments aux morts. C’était risible. Il était d’un coté une fraude inexistante, de l’autre coté il était mort, six pieds sous terre, depuis déjà sept ans. Et lui au final, qu’était-il ? Une fraude ou un mort vivant ? Un menteur compulsif ou un ressuscité ? Dit comme ça, à choisir, il préférait être le ressuscité. C’était un brin plus classe, plus vendeur. Mais que pouvait-il faire de cette nouvelle identité dont il ne connaissait rien ? Il n’avait pas les papiers correspondant à cet homme, et sa mémoire ne lui permettait pas de retrouver quoique ce soit d’utile. La clé s’était cassé dans la serrure, et il était enfermé dans son propre cerveau. Dans cette coquille vide laissée là pour y pourrir, pour y mourir. Désespoir. Abandon. Néant. Il n’y avait plus rien qu’il puisse faire. Plus rien à espérer. Il avait perdu. Son cerveau avait gagné, ce coffre fort inviolable l’avait vaincu. Il n’y avait plus rien à imaginer.

Morne esprit, autrefois amoureux de la lutte,

Tu marches, en vain. Quelque part. Un lieu qui ne ressemble a rien, qui ne te dit rien. Ca ne change pas de d’habitude. Ca ne t’étonne pas. Plus rien ne ressemble à rien de nos jours. Toi même tu ne te ressembles pas. Tu ne reconnais pas ce visage qui est le tient. Ca pourrait être un autre. Tient, celui là, qui apparait là, ce visage pourrait être le tient. Pourquoi pas après tout. Il ne te dit rien non plus. Tu entends son nom, ton nom. Ca pourrait bien être l’inverse. Enfin peut être pas. Lui semble se souvenir. Et puis peut importe. Tu continues à marcher, parce qu’il n’y a rien d’autre à faire. C’est ce que tu as fait pendant sept ans. Il paraît. Marcher. Pour aller ou tu n’en savais rien. Pour fuir quoi ? Tu ne savais pas non plus. Mais tu le faisais. Parce que tu n’avais pas le choix. Et maintenant le choix tu l’as. Fuir. Marcher. T’arrêter. Mais tu ne sais pas. Tu ne sais pas ce qui t’appartient, ce que tu veux. Tu n’es rien. Qu’une volonté absente. un espoir vain.

L’espoir, dont l’éperon attisait ton ardeur,
Ne veut plus t’enfourcher ! Couche-toi sans pudeur,
Vieux cheval dont le pied à chaque obstacle butte.


Cet endroit est labyrinthique. On te la dit. Ou du moins tu l’as su un jour. Ici, quelque part, ce trouve ce que tu cherches. Tu te trouves ici, quelque part. Il faut juste que tu te mette la main dessus. Mais tu as cherché mille fois. Des portes rouillées dans lesquelles tu pourrais peut être un jour enfoncé la clé, il y en a des milliers. Des milliers qui ne t’ont pas répondu, et qui ne veulent rien t’apporter de plus. De toute façon tu as brisé la clé.

Résigne-toi, mon coeur; dors ton sommeil de brute.

Tu ne trouveras jamais. Abandonne. Laisse toi tomber. Il n’y aura personne pour te ramasser. Il n’y a jamais eu personne. C’était une idée vaine. Tu as brisé la clé, il n’y a plus rien qui te retienne. Plus rien qui t’attende. Nul part. Tu te souviens la question stupide que tu avais posé au médecin lorsque tu avais appris que la balle était toujours dans ton genou ? Tu avais demandé s’il elle ne pouvait pas se mettre à bouger, et que par malheur elle ne se retrouverait pas à naviguer jusqu’à ton coeur. Endors toi et je me chargerais de toi. Ca ne fera presque pas mal. Tu n’as plus rien à faire d’autre de toute façon.

Esprit vaincu, fourbu ! Pour toi vieux maraudeur,
L’amour n’a plus de goût, non plus que la dispute;
Adieu donc, chants du cuivre et soupirs de la flûte !


Il y a toujours quelque chose qui t’écrase dans ce regard qui se pose sur toi. Et ce n’est pas seulement cette main forte qui te plaque contre le mur, qui te brise les poumons, contrôle ta respiration et ta vie par la même occasion. Il te tire un moment de ton labyrinthe. Il te fait demander ce que tu veux vraiment. La seule chose qui pourrait t’importer à présent. Mais il te le refuse. Parce que lui n’a pas le goût du néant. Pas encore. Lui a le goût de toi vivant, quelque part, pour une raison inconnu. Pour la même raison que son regard t’écrase et te contrôle. Pour cette même raison que tu ne parviens pas à nommer. Comme ta vie. Tout n’est qu’une vaste incompréhension. Un vague néant, mais même ça on ne te l’accorde pas tout à fait.

Plaisir, ne tentez plus un coeur sombre et boudeur !
Le Printemps adorable a perdu son odeur !


«Je sais» Tu l’entends. Il te ramène à ta conscience. Conscience vide et inutile. Mais il t’appelle quelque part. Et il a une ascendance sur toi. Quelque chose que tu ne comprends pas, que tu ne comprendras jamais. Parce que tu n’es plus.

Charles soupire sous la phrase d’Aristarkh. Il sait. Comme s’il acceptait. Comme si lui avait accepté qu’il n’y est plus rien à faire. Que le Charles qu’il avait connu ne serait plus jamais là pour lui. Il avait surement raison d’agir comme ça. Après tout il n’était pas le seul à abandonner. Mais voir l’autre laisser tomber aussi facilement que lui le fait réagir. Il essaye. Encore et encore. On ne sait jamais. Si quelque chose dans ce labyrinthe viendrait à lui dire quelque chose. C’était stupide. Mais il en tirait quelque chose. Une sonorité. Une sonorité qu’il aimait prononcer, comme si c’était un indice. Il devait arrêter. Ca devenait stupide. S’affligeant de l’inutilité de son avancé il ne remarqua pas le trouble dans lequel il venait de jeter son interlocuteur. Pour une simple histoire de prénom. Oui il aimait ce prénom. C’était aussi stupide comme réponse. En même temps l’homme faisait avec les cartes qu’il recevait. Et il n’avait donc qu’un piètre jeu. Il aimait bien un prénom. Et alors ? Qu’est ce que ça pouvait lui apporter ? Il y avait beaucoup de prénom qu’il aimait bien.

Pourquoi avait-il cédé à ce semblant d’espoir ? Parce que l’autre avait abandonné ? Et bien il avait raison. Il lâchait tout. Suffit de faire semblant. Il n’y arriverait jamais. Il ne voulait même plus y arriver. Ca ne servait à rien. Rien ne reviendrait. Coquille vide. Depuis trop longtemps. Pour trop longtemps encore. Ce n’était plus possible. Le néant l’avait rongé bien plus que le spleen. Il était temps de s’y abandonner. Abandon coupable, pitoyable, mais délicieux. Ce laisser tomber sans lutter à ce vide qui vit en toi depuis si longtemps. C’est comme une fin en soit. Mais l’autre intervient. L’autre qui semblait avoir abandonné. Qui semblait s’être résigné. Il s’insurge. Une fois. Est-ce qu’on lui a demandé quelque chose ? Charles ne veut pas être sauvé... «Mon problème Charles ? C'est toi de toute évidence. Pathétique ça tu l'es mais Charles vaut tellement mieux que ça, tellement mieux que toi. Je suis peut être pas un enfant de cœur certes. Oui je pourrais te buter. Oui je pourrais te foutre une putain de balle entre les deux yeux sans même regarder.» Ou peut être que Charles le veut. Mais Edgar ne le sait pas. Edgar ne connait pas Charles. Edgar ne connaîtra jamais Charles. SO WHAT ? «Et bien fait le ! Tu attends quoi ?» Pensait-il qu’il avait peur de sa noirceur ? De sa violence ? Peut importe le chaos qui traînait dans l’homme, Aristarkh, c’était peut être pire chez lui, Edgar. «Mais c'est pas à propos de moi tout ça. C'est beaucoup trop facile. Elle est passée où ta paire de couille Delancastre?» La première chose qui lui vient à l’esprit aurait été d’attraper la main de l’homme et de la plaquer là, sur son entre jambe, lui faire sentir que ce qu’il déplorait comme absent était toujours là, et que ce n’était réellement pas le problème. Mais après une prise de conscience il se rendit compte que c’était une idée aussi étrange, que stupide, que franchement immorale, et dégoutante, et que lui vivant pas un seul homme ne s’approcherait de lui de cette manière là. Sa réaction impulsive arriva donc avec quelques secondes de retard, mais il explosa. Explosa en hurlement et en grand geste. «Et arrête de m’appeler Charles ou Delancastre ! Je ne sais pas de qui tu parles putain !» C’était sortit tout seul. Mais ce Charles l’énervait. Charles semblait être un dieu. Quelqu’un de merveilleux. Et il n’en était même pas l’ombre. Savoir qu’il avait perdu une tel personnalité le tuait. «Je m’appelle Edgar Duval, et je n’ai aucune putain d’idée de qui est ton Charles, et ça me tue. Arrête de me regarder comme si j’étais lui, je ne peux pas rivaliser avec mon fantôme !» Quel idée d’être jaloux d’une identité morte au fond de lui même. Il avait beau ne pas savoir qui était Charles pour l’homme, il n’avait qu’une envie, l’être à nouveau. Parce que Charles déclenchait les foudres et les passions. Que Charles était voulu. Et il voulait savoir à quel point.

Peut être qu’il n’aurait pas du. Il n’eut pas le temps de dire ouf. Il eut à peine le temps d’écarquiller les yeux que l’homme avait réduit toute distance, qu’une main s’était glissée derrière sa nuque lorsque l’autre lui brûlait le torse et que leurs lèvres s’étaient scellées. Leurs lèvres s’étaient scellées. Il l’avait embrassé. Embrassé. Et Charles s’était laissé faire. Les bras ballants, les yeux grands ouverts écarquillé de surprise, le souffle coupé, l’estomac au fond de ses chaussettes, et le coeur... Le coeur quoi ? L’homme s’écarta et balança une vérité qu’il ne comprenait pas. Il n’était plus rien, mais qu’avait-il été au juste? Qu’est ce que c’était que ça? Alors que l’homme le lâchait, ses jambes refusèrent de le porter plus longtemps et il se laissa glissé contre le mur, à bout de souffle, incapable de mettre un mot sur ce qui venait de se passer. «Tu... Je...» Sa poitrine se soulevait à intervalle beaucoup trop rapide. Il n’arrivait pas à assimiler. Que venait-il de ce passer ? Il tourna la tête vers l’homme qui s’était échoué à coté de lui, et son regard tomba sur ses lèvres. Ses lèvres qui venaient de l’attaquer quelques secondes plus tôt. Pourtant il se surprit à penser à recommencer. Comme si la seule chose qui importait ce trouvait là devant lui. Choqué par cette pensée il hurla. «C’était quoi ça ? Tu crois quoi là ? Je ne suis pas ! Je ... Tu... Elle t’embrassait tout à l’heure... Tu... Je ne suis pas ! Ne t’approche plus de moi.» Il tremblait de rage et de mille et une chose. Son néant était devenu d’un compliqué. Il avait le souffle court, l’estomac tordu de douleur. Il aurait pu continuer à hurler, il aurait pu se mettre à frapper. Mais Baudelaire heurta ses oreilles. D’abord ses lèvres et maintenant ses oreilles. L’homme avait-il décidé de venir le violer de toutes les manières possibles et imaginables ? Des viols diablement attirant séduisant et agréable, mais des viols quand même. Il n’avait rien demandé que diable. Ou peut être que si...

«Tu as du bourbon ?» Hein ? Quoi ? L’homme lui parlait ? Encore ? Du Bourbon ? Avait-il une tête à boire du bourbon ? Franchement ? «De la vodka.» C’était pourtant évident, non ? Il était Français que diable. Enfin Russe. Il était Russe. Ou Français. Peut importe. De toute sa vie de mémoire, il avait vécu en Russie. Comme si c’était une nécessité, et malgré son esprit encore saoul de la veille il se releva péniblement, balançant tout son poids sur ses bras pour éviter de devoir forcer sur son genou. Debout il commença à marcher en clopinant vers son bureau, sa chambre, son tout. Il fit un geste à l’homme de le suivre. Il ne savait pas pourquoi il l’invitait à rentrer, à rester. Il devrait le jeter, le frapper jusqu’au sang, ou n’importe quoi après ce qu’il avait fait. Mais il était étrangement vide. Et aussi abominable que ça devrait être, ça l’avait réveillé un instant. Et avec un peu de vodka il aurait surement oublié demain. Clopinant en rythme de ses pensées il ne s’entendit pas parler.

« Et le temps m’engloutit minute par minute,
Comme la neige immense un corps pris de roideur;
Je contemple d’en haut le globe en sa rondeur
Et je n’y cherche plus l’abri d’une cahute.
Avalanche, veux-tu m’emporter dans ta chute ?»


Il arriva sur la fin de son poème à son bureau. Claquant ses talons et se laissant tomber sur le fauteuil et en indiquant un en face à l’homme. Au moins ici il y aurait une distance de sécurité. Par dessus le bureau déchiré d’un poète vaincu par ses démons, il posa deux verres et une bouteille. «A mes morts» railla-t-il avant de prendre un premier cul sec, comme s’il n’avait toujours pas oublié son idée de plus tôt.
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